L'accord renforce la place économique suisse, s'est félicité jeudi Serge Gaillard, chef en la direction du travail au Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) en présentant à la presse le 7e rapport de l'Observatoire de la libre circulation des personnes.
Les travailleurs suisses n'ont pas été évincés
Depuis l'entrée en vigueur de l'accord en 2002, les entreprises ont largement tiré parti des nouvelles possibilités de recrutement. Le solde migratoire est passé de 26'000 personnes par an à 67'000 personnes aujourd'hui. Mais il n'y a pas eu d'éviction des travailleurs suisses.
Devenue à 58% le fait de ressortissants de l'UE ou de l'AELE, l'immigration a suivi l'évolution conjoncturelle: elle s'est tassée en 2009 avec la récession mais la forte reprise a stoppé son recul. Le taux d'occupation des étrangers a progressé parallèlement à celui des travailleurs indigènes et permis de combler les lacunes de personnel.
Hauts salaires à la baisse
Les nouveaux arrivés de l'UE/AELE sont qualifiés: 51% disposaient d'une formation tertiaire et ont rejoint des professions avec des exigences relativement élevées. Cela pourrait avoir quelque peu freiné la croissance soutenue des des salaires à haut niveau de qualification. Mais l'évolution générale des salaires n'a pas changé avec l'entrée en vigueur de l'accord sur la libre circulation.
La protection des salaires faibles s'est plutôt améliorée ces dix dernières années et les contrôles n'ont jamais été aussi intenses, a relevé Serge Gaillard. Le Secrétariat d'Etat à l'économie veut toutefois continuer à examiner les choses de près et intervenir si nécessaire. Pour Daniel Lampart, économiste en chef de l'Union syndicale suisse, la pression sur les salaires est une réalité, surtout à l'embauche.
L'emploi temporaire a augmenté l'an passé de 25% et près d'une agence de travail temporaire sur deux a versé des salaires trop bas. Alors qu'on n'en manque pas en Suisse, la main-d'oeuvre peu qualifiée a d'ailleurs fortement augmenté parmi les frontaliers. Sa part est passée de 12 à 17% depuis l'entrée en vigueur de l'accord, a rappelé le syndicaliste en plaidant pour des salaires minimums.
Frontaliers problématiques
Selon le rapport, l'emploi frontalier a progressé plus que la moyenne, surtout dans l'arc jurassien, la région lémanique et au Tessin. L'embauche des résidents a suivi la même courbe jusqu'en 2008, mais ces dernières années, le chômage s'est développé davantage dans la région lémanique, l'arc jurassien et le nord-ouest de la Suisse que dans les régions non frontalières.
A la longue, il serait toutefois faux de prendre des mesures de préférence nationale ou cantonale comme l'envisage le Conseil d'Etat genevois, estime Thomas Daun, directeur de l'Union patronale suisse. Genève doit veiller à rester compétitive.
Les patrons soutiennent une application stricte des mesures d'accompagnement mais ne veulent pas de salaires minimums dans tous les cantons. On peut encore améliorer les choses mais la libre circulation est nécessaire à la prospérité de la Suisse. Ce serait un "exercice kamikaze" que de résilier l'accord pour des problèmes non causés par l'immigration comme la pénurie de logements ou le manque d'infrastructures, a défendu ThomasDaun.
Les assurances sociales comme l'AVS et l'AI ont profité massivement de la libre circulation. Seule l'assurance chômage a vu ses coûts augmenter, les saisonniers pouvant eux aussi faire valoir leurs droits aux indemnités. Jusqu'à présent, ces coûts supplémentaires sont toutefois restés en deçà des prévisions.
ats/cer