Depuis décembre 2009, Mark Muller, conseiller d'Etat genevois en charge notamment des constructions, habite un attique de 7 pièces (6 pièces plus la cuisine) en plein coeur de Genève. Selon l'extrait de l’état locatif actuel de l’immeuble, que le 19:30 de la TSR s’est procuré, cet appartement coûte 21'600 francs par année à l'élu libéral, soit 1800 francs par mois, plus les charges.
Le conseiller d'Etat précise pour sa part que son loyer a été officiellement fixé à 2000 francs par mois, conformément à la loi sur les démolitions, transformations et rénovations d'habitations. Il réfute aussi "toute faveur, tout favoritisme et tout copinage" et dit ne pas connaître le propriétaire de l’immeuble.
Un 7 pièces coûte en moyenne 7500 francs
Selon l'extrait de l'état locatif, l’ensemble des loyers de l'immeuble sont bas par rapport au prix du marché. A cet égard, le 7 pièces occupé par Mark Muller et ses fils est particulièrement bon marché dans une ville où les prix flambent. Un 3 pièces dans un immeuble voisin de celui du conseiller d’Etat est par exemple loué 2000 francs par mois.
Par ailleurs, pour 1800 francs, la régie qui gère l'appartement de Mark Muller (le Comptoir immobilier) offre un 5 pièces dans un immeuble de bas standing en banlieue de Genève. Selon les statistiques cantonales, si l’on prend l’ensemble des loyers de grands logements (anciens et nouveau baux), ils coûtent entre 2800 francs et 3200 en moyenne. Mais si on ne tient compte uniquement des baux récents, un 7 pièces coûte en moyenne 7500 francs.
Pour protéger les locataires, la loi plafonne le montant des loyers après travaux de rénovations à 3360 francs par pièce et par an.
Mark Muller: "Le copinage existe"
Mark Muller a tenu à répondre à cette information: "Je suis dans un de ces appartements qui grâce à la gauche de ce canton, les milieux des locataires, jouit effectivement d'un loyer qui est bas et qui est fixé de manière officielle." Et d'attribuer la responsabilité "aux effets pervers des lois mises en place par la gauche et l’Asloca".
Le conseiller d'Etat ajoute encore: "Ce marché du logement très déséquilibré, avec d'une part un certain nombre de logements artificiellement maintenu à bas loyers, et d'autre part un marché qui explose avec des loyers exorbitants, ouvre la porte à un certain nombre de phénomènes. Effectivement, il y a un phénomène de copinage qui fait que les bonnes affaires peuvent dans certain cas bénéficier à des personnes qui d'un point de vue financier n'en auraient pas besoin."
L'Asloca déplore
Christian Dandrès, de l’Asloca, ne veut surtout pas critiquer l’existence de loyers abordables à Genève. Mais il déplore que ce soit un conseiller d’Etat "qui gagne sans doute 20'000 francs par mois qui en profite. Il faudrait que les familles puissent en profiter."
Ceci dit, comme l’explique l’avocat de l'Asloca, le loyer payé par Mark Muller est tout à fait légal: "Oui, c'est légal. Il n'y a pas de loyer minimum prévu dans la loi, que des maximums qui dans près des 80% des cas ne sont pas respecté par les régisseurs. Evidemment, si vous êtes ancien secrétaire de la Chambre immobilière, vous connaissez suffisamment de personnes qui seraient disposée à vous offrir des prix d'amis."
L'immeuble où loge Mark Muller appartient à une société privée, la Société genevoise d'investissements fonciers SA. Celle-ci a répondu que, après vérification auprès du Comptoir Immobilier SA, le loyer auquel il est fait référence "représente le loyer maximum autorisé par la loi".
Anne-Frédérique Widmann/boi
Les réactions politiques
Christian Bavarel (député Verts au Grand Conseil): "Je suis écoeuré, je suis écoeuré surtout pour nos concitoyens. Les députés libéraux ne cessent de défendre en commission des loyers au niveau du marché."
Anne-Marie von Arx (député PDC au Grand Conseil): "Puisque Monsieur Muller peut apparemment avoir accès à ce type d'appartements, eh bien que cela puisse servir d'électrochoc pour que des régies mettent ce même type d'appartement à un même prix aux familles genevoises qui en ont besoin."
Céline Amaudruz (présidente de l'UDC): "Nous regrettons la politique de petits copains, politique de copinage qui a été mise en place par la gauche, qui continue d'ailleurs au niveau de la ville, et on voit que c'est une maladie incurable et malheureusement contagieuse à la droite."
Pierre Weiss (vice-président du PLR suisse): "Je dis qu'ici il y a un loyer fixé par l'Etat, que n'importe qui aurait pu en bénéficier, que ce sont des chambres de bonnes. Par conséquent je ne vois pas où est le problème sinon au niveau du caniveau."