Négociée début juillet, la convention complémentaire entre les partenaires tarifaires concernait les modalités de l'introduction, prévue au 1er janvier 2012, du système de forfaits par cas. Celui-ci détermine le prix d'un séjour hospitalier en fonction de la pathologie concernée (voir encadré).
L'accord conclu entre santésuisse et H+ portait sur quatre points: la livraison des données des patients aux assureurs afin de contrôler les factures, l'indemnisation des investissements, la surveillance des coûts et la présentation des données de coûts pour les négociations.
Trois quart des membres de H+ ont refusé cette convention lors d'un vote auquel 81% des hôpitaux de Suisse ont participé. "C'est l'ensemble du compromis qui n'a pas convaincu", a affirmé lundi H+ dans un communiqué, mentionnant autant la transmission des données, pour laquelle les hôpitaux veulent des limites claires, que l'indemnisation des investissements, jugée insuffisante.
Secret médical en danger
Mais pour les observateurs, c'est avant tout la question de la transmission des données des patients qui a surtout été critiquée. L'insistance des assureurs à obtenir ces informations a fait capoter l'accord, a ainsi estimé Pierre-Yves Maillard, conseiller d'Etat vaudois et président de la Conférence des directeurs cantonaux de la santé, interrogé par l'ats.
Les médecins et les patients ont en effet appelé les hôpitaux à rejeter l'accord, craignant que les caisses maladie utilisent les données pour leurs activités commerciales dans le secteur des assurances complémentaires. Leur avis était partagé par l'association des commissaires suisses à la protection des données, qui n'hésitait pas à dire que le secret médical était en danger.
Désavouée par ses membres, H+ estime maintenant que l'introduction du système de forfaits par cas doit se régler au niveau des cantons. Concrètement, cela signifie que chaque hôpital ou groupes hospitaliers doivent négocier une solution individuelle avec les caisses maladie.
Didier Burkhalter à la rescousse
Une solution impensable pour Pierre-Yves Maillard: "le but de la réforme était de pouvoir comparer les performances et les résultats des hôpitaux entre eux. Pour y arriver, on ne peut pas maintenant laisser les hôpitaux négocier avec chaque caisse maladie. Il est incontournable que le Conseil fédéral tranche", a-t-il dit.
"L'absence de modalités claires d'application du nouveau financement hospitalier engendrerait une situation chaotique", a confirmé santésuisse dans un communiqué. Cette situation "priverait le nouveau système d'un outil de contrôle des dépenses hospitalières, laissant la porte grande ouverte aux hausses de primes".
Informé de la situation, le ministre de la santé Didier Burkhalter va donc intervenir pour obtenir un règlement unique, même s'il aurait préféré un accord entre H+ et les caisses maladie, a déclaré son porte-parole, Jean-Marc Crevoisier.
Calendrier serré mais tenable
Selon lui, il ne serait en effet pas judicieux de régler canton par canton les questions ouvertes concernant la transmission médicale de données ou l'indemnisation des coûts d'investissement. D'autant plus que le temps presse. Pour le directeur de H+, Bernhard Wegmüller, la question de savoir si la Confédération doit intervenir et le cas échéant dans quels domaines, reste encore ouverte.
Si le Conseil fédéral fait une proposition de règlement, tous les membres de l'association seront alors invités à prendre position, a-t-il précisé. Rappelant que la structure du tarif, le plus gros point du nouveau système, a déjà été approuvée par tous les partenaires, Charles Favre, président de H+, a estimé que la date du 1er janvier 2012 devrait pouvoir être tenue. Si la Confédération décide rapidement, c'est possible, a confirmé Pierre-Yves Maillard. "Mais il n'est pas exclu que la décision du Conseil fédéral soit attaquée et que la base légale soit discutée", a prévenu le conseiller d'Etat vaudois.
ats/hof
Décryptage: les "forfaits par cas"
Le système des forfaits par cas prévoit la rémunération des prestations hospitalières à des prix forfaitaires fixés en fonction du diagnostic et non des coûts réels engendrés.
Par exemple, deux opérations de l'appendicite réalisées dans des conditions strictement équivalentes ne pourront pas être facturées à des tarifs différents, même si l'hospitalisation pour l'une a duré deux jours et l'autre quatre.