La décision est tombée par 11 voix sans opposition et deux abstentions, a indiqué mardi le président de la commission Rolf Schweiger (PLR/ZG) devant la presse. Si le PLR parle de "retour à la raison", la gauche et les Verts ne cachent pas leur déception (toutes les réactions ci-contre).
Solution de compromis
La commission a corrigé une motion adoptée en juin par le National pour soutenir la stratégie gouvernementale d'abandon progressif de l'énergie atomique. Il s'agit d'une solution de compromis, a précisé Didier Berberat (PS/NE). Pour éviter un blocage total, le camp rose-vert s'est plié aux requêtes du camp bourgeois. Les tenants du nucléaire ont ainsi pu sauver la face, selon Luc Recordon (Verts/VD). La droite dure s'est finalement abstenue.
La motion prévoit désormais qu'aucune autorisation ne sera plus accordée pour la construction de centrales nucléaires "de la génération actuelle". Cet ajout laisse la porte ouverte à d'éventuels réacteurs pourvus de nouvelles technologies. Les experts s'accordent à dire qu'aucune percée n'aura lieu dans ce domaine avant 2050/2060, a relaté Didier Berberat.
Des conditions très strictes
Quant à savoir ce que sont les technologies futures, la loi devra le définir. Mais il devra s'agir d'innovations véritables, une petite amélioration du nucléaire ne suffira pas, selon le Neuchâtelois.
En résumé, les réacteurs du futur devraient exclure toute émission de radioactivité et ne produire aucun déchet qui durerait au-delà d'une génération, a renchéri la Verte libérale Verena Diener (ZH).
La commission n'a pas retouché la motion sur la question de la mise à l'arrêt sans délai des centrales qui ne sont plus conformes aux exigences de sécurité. Un passage a en revanche a été biffé. Il précisait que les centrales encore conformes aux exigences de sécurité pouvaient continuer d'être exploitées et seraient mises à l'arrêt progressivement.
Une stratégie globale demandée
Côté approvisionnement en électricité, le gouvernement est appelé à élaborer une stratégie énergétique globale. Elle devra viser à garantir la couverture des futurs besoins en électricité sans recourir au nucléaire. Un approvisionnement indépendant des ressources de l'étranger devra être assuré sans que la place économique suisse soit mise en danger. Des mesures ciblées devront encourager l'énergie renouvelable et l'efficacité énergétique.
La commission a aussi précisé que la formation et la recherche dans le domaine de l'énergie, nucléaire y compris, devrait continuer d'être soutenues. Il est essentiel d'obtenir des percées, notamment pour ce qui est de la gestion des déchets, a estimé Didier Berberat.
Dans un mois au plénum
La motion demande encore au Conseil fédéral de rendre compte régulièrement de l'évolution des techniques et de la mise en place de la stratégie énergétique. La commission n'a pas encore tranché la question de savoir si une modification de la constitution serait nécessaire, avec une votation populaire à la clé.
Elle rediscutera du dossier la semaine prochaine. Certaines formulations pourrait être modifiées, mais il n'y aura pas de changement de fond, selon Rolf Schweiger. Le Conseil des Etats se prononcera le 28 septembre. Si le National devait refuser par la suite le texte amendé, celui-ci serait enterré.
Par ailleurs, le groupe énergétique bernois FMB a indiqué mercredi qu'il allait remettre en marche la centrale nucléaire de Mühleberg au plus tard à fin septembre. A lire: Nucléaire
ats/cer
Toutes les réactions
La conseillère fédérale Doris Leuthard ne s'est pas opposée à la proposition de la commission, a déclaré René Imoberdorf (PDC/VS), membre de la commission de l'énergie du Conseil des Etats, sur les ondes de la radio DRS. Il estime que la ministre de l'Energie est l'accord avec la commission.
Le PLR voit dans la décision de la commission un "retour à la raison".
Les socialistes réagissent avec amertume, et, comme les Verts, se montrent déçus. Pour ces derniers, cette décision montre le manque de volonté politique pour un changement énergétique et atteste de la soumission au lobby de l'énergie atomique.
L'alliance "Non au nucléaire" parle quant à elle d'un "bien mauvais service rendu à la Suisse". Pour l'organisation, le secteur électrique a besoin de signaux clairs et d'une planification sûre. L'alliance réunit plusieurs organisations de protection de l'environnement, des partis et d'autres groupements d'intérêts.