Les services du Commissaire à la Fiscalité étudient scrupuleusement ces accords, et mardi, Algirdas Semeta répondra aux questions de Sharon Bowles, eurodéputé de la Commission pour les Affaires économiques et monétaires. Un signe de l’intérêt du Parlement pour ces accords…
Selon nos informations, le Commissaire a le choix entre deux angles d’attaque:
1 . Il conteste la capacité même des Etats membres pour négocier des accords bilatéraux avec la Suisse, au motif que ces Etats ont déjà délégué leur compétence à la Commission avec la fameuse directive sur la fiscalité de l’épargne.
2 . Il s’en prend non pas aux Etats membres, mais à des points précis contenus dans les accords, notamment au taux d’imposition (qui est inférieur dans les accords bilatéraux à ce qui est prévu dans la directive fiscalité de l’épargne) ou bien à l’accès des marchés financiers aux entreprises suisses, qui est la contrepartie obtenue par Berne en échange de sa coopération.
La Suisse abriterait des fonds grecs ayant échappé au fisc
La Commission n'a pas besoin d'être soutenue par les autres institutions de l’Union européenne pour contester en justice, puisqu'elle est dans son rôle de gardienne des Traités européens en portant le dossier en justice. Mais elle peut avoir juridiquement raison, tout en étant politiquement isolée.
On le voit avec la Grèce. Ces derniers jours, plusieurs voix se sont élevées pour recommander à Athènes de négocier rapidement, elle aussi, un accord avec Berne. C’est le cas du chef de la task force européenne en Grèce, l’homme qui connaît l’état des comptes publics grecs et qui a une bonne idée de la fraude fiscale. En privé, cet homme dit que ces derniers mois, plus de 15 milliards d’euros ont échappé à la Grèce pour aller vers Chypre et la Suisse.
Martin Schulz, chef des socialistes et futur président du Parlement européen est sur la même ligne. "Il y a le feu, il faut récupérer de l’argent le plus vite possible", explique un de ses proches. Des discussions exploratoires sont prévues la semaine prochaine.
Une crise qui pourrait aider la Suisse
José Manuel Barroso a dit la semaine dernière qu’il demandera aux 27 de lui donner un mandat pour "négocier des accords fiscaux bilatéraux au nom de l’Union Européenne". Mais, soumis à la pression des marchés et des agences de notation, plusieurs pays sont tentés de parer au plus pressé en signant rapidement des accords fiscaux bilatéraux avec la Suisse, pour récupérer maintenant des milliards, plutôt que d’attendre le résultat d’hypothétiques négociations qui seront, c’est sûr, très longues. Et on sait que Paris et Rome sont tentés de franchir le pas.
Alain Franco, correspondant RSR à Bruxelles/am