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Tunisie: le parti islamiste Ennahda en tête

Le parti islamiste Ennahda a annoncé qu'il devrait recueillir environ 40% des suffrages aux premières élections libres de la Tunisie, alors que les résultats définitifs du vote pour une assemblée constituante devaient être annoncés officiellement mardi.

"Nous allons obtenir entre 60 et 65 sièges dans l'assemblée constituante" a déclaré à l'AFP sous couvert de l'anonymat un dirigeant du mouvement islamiste. Ennahda estime avoir remporté environ 40% des suffrages ce qui, en nouant des alliances, le placera en position de force.

Selon le dirigeant d'Ennahda, le parti islamiste a remporté au moins neuf des 18 sièges réservés aux Tunisiens résidant à l'étranger dans l'assemblée constituante de 217 membres qui sera chargée de rédiger une nouvelle constitution et de désigner un nouvel exécutif jusqu'aux prochaines élections générales.

La gauche derrière

Le mouvement Ettakatol (gauche) de Mustapha Ben Jaafar et le Congrès pour la République (CPR, gauche nationaliste) de Moncef Marzouki se disputent la deuxième place au scrutin, selon les estimations données par ces partis à l'AFP. "Nous aurons autour de 15% des suffrages, ce qui se traduirait par un minimum de 30 sièges selon des statistiques à l'échelle nationale", a déclaré à l'AFP Khalil Zaouia, numéro 2 d'Ettakatol.

"On espère être les seconds", a déclaré Moncef Marzouki, dirigeant du CPR crédité de 15 à 16% des suffrages, selon des estimations concordantes.

Le Parti démocrate progressiste (PDP, centre-gauche) qui était donné par les sondages en seconde position, a également pris acte de sa défaite.

Résultats définitifs mardi

Les résultats définitifs devraient être connus mardi après-midi, a annoncé Kamel Jendoubi, président de l'Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE). Le secrétaire général Boubaker Bethabet a précisé que plus de 90% des 4,1 millions d'électeurs (sur 6,5 millions de votants potentiels) se sont rendus aux urnes dimanche.

Première à se dérouler dans un pays du "Printemps arabe", l'élection a été encadrée par plus de 5000 observateurs locaux et plus de 500 étrangers et 15 organisations étrangères, dont les plus importantes sont une mission de l'Union européenne avec 180 observateurs.

Files d’attente

Plus de 7 millions d'électeurs étaient appelés à élire une assemblée nationale constituante qui sera chargée de rédiger une nouvelle constitution et de désigner un nouvel exécutif avant les élections générales. La participation a dépassé toutes les attentes.

Dès l'ouverture du scrutin dimanche, de longues queues s'étaient formées devant les bureaux de vote à Tunis et dans les grandes villes de province, et l'affluence ne s'est pas tarie de la journée. A 19H00, heure de clôture des bureaux, des dizaines de personnes finissaient encore de voter dans plusieurs centres.

Des files d'attente se sont créées aux entrées des bureaux de vote. [KEYSTONE - STRINGER]
Des files d'attente se sont créées aux entrées des bureaux de vote. [KEYSTONE - STRINGER]

L'affluence était également notable dans les grandes villes de province où des milliers d'électeurs, impatients mais disciplinés, attendaient d'accomplir leur devoir électoral.

Londres et Bruxelles ont salué la tenue de ces élections. Coïncidence du calendrier: la Tunisie se rend aux urnes le jour même où son voisin libyen doit proclamer sa "libération totale", trois jours après la mort de Mouammar Kadhafi.

La presse tunisienne enthousiaste

La presse tunisienne saluait lundi le "triomphe de la démocratie" et ses éditoriaux reflétaient la fierté manifestée la veille par les électeurs. "Vous avez fait le printemps de la démocratie arabe", écrivait l'hebdomadaire arabophone Assabah, tandis que le quotidien Al Chourouk estimait que le "grand vainqueur" de l'élection était "la Tunisie".

"Enfin libres", s'enthousiasmait l'éditorialiste de Tunis Hebdo. Pour Sofiene Ben Farhat, journaliste et écrivain, "le peuple tunisien a imposé son agenda, il a été à la hauteur d'un moment historique".

agences/pbug/bkel/pima

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Les fonctions de l'assemblée constituante

Les 217 élus de l'Assemblée nationale constituante auront pour principal mandat la rédaction d'une nouvelle constitution tunisienne, mais ils devront aussi mettre en place un nouvel exécutif et légiférer jusqu'à la tenue d'élections générales.

Combien de temps siégera-t-elle? La question a fait l'objet de débats et de controverses, certains partis s'inquiétant d'une assemblée souveraine qui resterait des années au pouvoir. Mi-septembre, 11 des principaux partis tunisiens ont signé "une déclaration de transition" prévoyant notamment que le mandat de l'assemblée "ne doit pas dépasser un an".

Mais "juridiquement, la Constituante est l'autorité suprême et n'est liée par aucun texte", souligne la constitutionnaliste tunisienne Rachida Ennaifer. Elle rappelle que la première assemblée constituante tunisienne, élue en 1956 après l'indépendance, a mis trois ans à rédiger une constitution.

Outre sa mission d'établir un nouveau régime pour la Tunisie post-Ben Ali, l'assemblée devra aussi désigner un nouvel exécutif et légiférer. D'après la déclaration transitoire de septembre, l'actuel gouvernement provisoire restera en fonction jusqu'à ce que la Constituante élise ou coopte un nouveau président de la République, personnalité issue de l'Assemblée ou extérieure. Ce nouveau président formera l'exécutif. Les observateurs estiment qu'il faudra entre un et trois mois pour voir la mise en place d'un nouvel exécutif.