Le vice-président de la banque centrale, qui apparaît désormais comme le papable tout désigné pour succéder à Philipp Hildebrand, est resté jusque-là dans l'ombre de son prédécesseur. Il faut dire que le profil de gestionnaire de fonds international et d'ancien champion de natation de son prédécesseur suscitait davantage l'intérêt médiatique.
Les experts ne doutent cependant pas des qualités de l'actuel numéro deux de la BNS, docteur en économie, né à Bienne, marié et père de deux enfants. Le "Financial Times Deutschland" estimait ainsi mardi que cet homme de l'ombre est en fait "le cerveau de la banque centrale" et qu'il en est le "véritable décideur".
Thomas Jordan est entré en 1997 à la BNS, où il est engagé comme conseiller scientifique. Les années suivantes, il gravit progressivement les échelons hiérarchiques. En mai 2007, il accède au directoire tripartite de la BNS et prend la tête du 3e département.
Cette division coiffe notamment des marchés financiers, qui commencent à dérailler quelques mois plus tard. En 2010, il devient vice-président de la direction générale de la BNS et responsable du 2e département, en charge de la stabilité financière, des billets et des monnaies, des finances et des risques.
Longue carrière universitaire
Parallèlement à sa carrière au sein de la BNS, Thomas Jordan affiche aussi un solide parcours académique. Après avoir obtenu un doctorat en sciences économiques à l'Université de Berne en 1993, il effectue trois années de recherche à la prestigieuse université américaine de Harvard, où il rédige sa thèse d'habilitation.
Thomas Jordan enseigne depuis la théorie et la politique monétaires dans son alma mater d'origine, où il a été nommé professeur honoraire en 2003. Pendant plusieurs années, il a également donné des cours à l'Université de Zurich, portant eux aussi sur la politique monétaire.
Au plan international, l'économiste participe à plusieurs groupes de travail internationaux, au sein de la Banque des règlements internationaux (BRI) ou encore de l'OCDE. Il a aussi publié de nombreux articles sur la théorie et la politique monétaires dans des revues spécialisées renommées, selon la BNS.
Un praticien
Ce théoricien a toutefois su démontrer ses qualités de praticien, notamment dans le cadre du sauvetage d'UBS. A l'automne 2008, lorsque la banque est embourbée dans la crise des crédits hypothécaires pourris aux Etats-Unis, il prend la tête du fond de stabilisation (stabfund), où sont parqués les actifs toxiques de la banque, qui menacent son existence. L'opération s'avère finalement bénéfique: l'an dernier, le fonds a dégagé son premier bénéfice.
Thomas Jordan a également a également fait partie de la commission d'experts de la Confédération chargée d'examiner la problématique du "too big to fail". Il a notamment poussé à un renforcement de la réglementation des grandes banques.
Une chose est sûre, si le Conseil fédéral choisit Thomas Jordan pour reprendre définitivement le poste de Philipp Hildebrand, la politique de la BNS, avec un taux de change minimum de 1,20 franc pour un euro, ne devrait pas être modifiée. Cette stratégie sera poursuivie "avec détermination", a lui-même affirmé lundi Thomas Jordan devant les médias, en faisant clairement part de son intérêt pour la fonction.
ats/lan