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Les écarts de salaires continuent à se creuser en Suisse, selon l'USS

Aujourd'hui, les femmes gagnent encore 18,4% de moins que leurs collègues masculins. [Bernd Ege]
Les bas et moyens revenus voient leur charge "fortement augmenter à cause des primes maladie et des loyers", selon l'USS. - [Bernd Ege]
Les écarts de revenus se creusent en Suisse, déplore l'Union syndicale suisse. Les salaires élevés ont augmenté de près de 20% entre 2000 et 2010 alors que les bas salaires ont progressé de 5,5%.

Le décalage entre les salaires s'est fortement accru ces dernières années, constate l'USS dans un rapport publié lundi à Berne.

En 2010, une famille de quatre personnes avec un revenu élevé avait, après déduction du renchérissement, 15'000 francs de plus à disposition que dix ans auparavant; la même famille, mais à bas revenu, avait quant à elle 1300 francs seulement de plus à disposition.

Pour Daniel Lampart, de l'Union syndicale suisse, les travailleurs temporaires sont prétérités. [Peter Klaunzer]
Pour Daniel Lampart, de l'Union syndicale suisse, les travailleurs temporaires sont prétérités. [Peter Klaunzer]

Les hauts salaires ont augmenté de 18,7%, passant de 19'700 francs en 2000 à 23'400 en 2010. La progression est de 5,5% seulement pour les bas salaires qui ont passé d'environ 3700 à 3900 pendant la même période. L'augmentation est encore plus faible pour les salaires moyens qui sont passés de 4800 à 5000 en 10 ans, soit une augmentation de 4,1%.

Cela après déduction du renchérissement. Pour une famille comparable, mais avec un bas revenu, la hausse n'était que de 1300 francs, contre 2900 francs pour celle touchant un revenu moyen.

Politique fiscale critiquée

Pour Daniel Lampart, économiste en chef et premier secrétaire de l'USS, plusieurs facteurs expliquent cette évolution. "Les hauts salaires ont beaucoup plus augmenté que les autres. S'y ajoute une politique fiscale favorable aux couches supérieures de la société", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse à Berne.

En revanche, les bas et moyens revenus voient leur charge fortement s'alourdir à cause des primes des caisses maladie et des loyers, constate-t-il.

Cette évolution négative des salaires n'est pas "une loi de la nature mais découle de décisions politiques", signale Paul Rechsteiner, président de l'USS. Et de fustiger la deuxième réforme de l'imposition des entreprises. Celle-ci se traduira, selon lui, par des milliards de francs de pertes pour la Confédération.

Pour 2012, elle a entraîné 400 millions de francs en pertes fiscales pour les impôts sur le revenu et 350 millions pour l'impôt anticipé. Le président de l'USS en appelle à une intervention du Conseil fédéral et du Parlement pour faire obstacle à ce préjudice.

agences/cab/mre

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Les propositions de l'USS

Pour remédier aux inégalités croissantes, l'USS avance cinq propositions. Elle exige l'introduction d'un "salaire minimal absolu" de 22 francs de l'heure, comme le réclame son initiative qui a abouti début mars.

L'organisation suggère d'abandonner la politique salariale individualisée avec versements de bonus. Elle plaide au contraire pour des systèmes incluant des hausses générales de salaires. Elle préconise de renforcer l'imposition en fonction de la capacité économique. "L'Etat doit puiser ses recettes là où elles se trouvent, soit auprès des hauts revenus et des grandes fortunes", a souligné Daniel Lampart.

"Impôt antisocial"

L'organisation conseille de mener une politique active en matière de formation continue en faveur des salariés. Enfin, l'USS demande d'instaurer un financement de l'assurance maladie plus juste et dépendant du revenu.

A court terme, cela passe par une hausse des fonds destinés aux réductions des primes à payer aux caisses. "Les primes se transforment toujours plus en un impôt indirect antisocial", fait remarquer M. Lampart.

Trois fois "non" le 17 juin

L'Union syndicale suisse (USS) ainsi que le Syndicat des services publics (SSP) prônent trois "non" lors des votations fédérales du 17 juin. Tous deux rejettent les réseaux de soins, l'initiative de l'ASIN sur les droits populaires et celle sur l'épargne-logement.

Pour l'USS, les trois objets ont un point commun: une étiquette trompeuse. Le projet de réseaux de soins "renforcera le pouvoir des caisses maladie et fera du libre choix du médecin un privilège réservé aux nantis", écrit-elle dans la dernière édition du journal du SSP "Services publics".

Les deux organisations considèrent que l'initiative populaire "Accords internationaux, la parole au peuple" vise moins à améliorer la démocratie en politique étrangère qu'à épargner à l'Action pour une Suisse indépendante et neutre (ASIN) la récolte des 50'000 signatures nécessaires à l'aboutissement des futurs référendums sur les accords qu'elle voudra combattre.

Concernant l'initiative sur l'épargne-logement, l'USS estime qu'elle va profiter en premier lieu aux contribuables disposant de moyens suffisants.

Le classement de l'USS

Pour une famille de quatre personnes (deux adultes et deux enfant), l'USS classe les salaires
annuels ainsi:

Bas salaire: 67'000 francs
Moyen salaire: 119'000 francs
Salaire élevé: 228'000 francs

Pour les salariés célibataires, l'USS catalogue les revenus ainsi:

Bas salaire: 47'000 francs
Moyen salaire: 72'000 francs
Salaire élevé: 130'000 francs
Salaire très élevé: 280'000 francs