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Nouvelles technologies, les brèches dans la vie privée se diversifient

Géolocalisation, vidéosurveillance, dossier médical électronique ou passeport biométrique,... Avec les nouvelles technologies, les brèches dans le respect de la vie privée sont multiples et multiformes. Tour d'horizon en Suisse.

La géolocalisation est partout

Depuis quelques années, les offres de géolocalisation fleurissent. Elles permettent de connaître les horaires des transports publics à proximité du lieu où vous vous trouvez, les restaurants et autres commerces, ou même de vous localiser en cas d'accident (application de la Rega). Facebook, Google ou Twitter ont des offres de ce type. Pratique, la géolocalisation permet cependant de "suivre l'utilisateur à la trace et en temps réel". Les autres utilisateurs ainsi que les groupes qui la proposent disposent d'une donnée essentielle et hautement sensible: l'endroit où vous vous trouvez.

Différence notable en revanche: certains outils "suivent" l'utilisateur en temps réel grâce à un GPS, tandis que d'autres doivent être mis à jour manuellement. Ainsi, Google Latitude vous "piste", contrairement à Facebook Places. Ce dernier permet même de donner une position erronée.  A lire: Réseaux sociaux

Le phénomène n'est pas anodin: 19% des utilisateurs de téléphone mobile dans le monde utilisent les services de géolocalisation, selon une vaste étude menée début 2012 par TNS Sofres auprès de 48'000 personnes dans 58 pays.


Carte d'assuré et dossier médical électronique

Depuis 2011, toutes les personnes affiliées auprès d'une caisse maladie disposent d'une carte d'assuré. Dotée d'une puce électronique, elle contient des informations administratives et, sur demande de l'assuré, elle peut comporter des données médicales (allergies, médications, maladies et séquelles d'accident). La Fédération des médecins suisse a très vite dénoncé l'attitude des caisses maladies qui, sous prétexte de contrôler les factures, demandent à avoir accès à toutes les données du patient, même confidentielles.

La carte d'assuré constitue le premier élément du projet de cybersanté voulu par le Conseil fédéral. L'objectif est l'introduction en 2015 d'un véritable dossier électronique du patient.


Le commerce de données et le spam

Le commerce de données (adresse, âge, profession, habitudes de consommation) s'est particulièrement développé, notamment à travers le spam et le démarchage téléphonie. La question est particulièrement délicate car les personnes sollicitées dévoilent "volontairement" leurs données. Les concours et autres enquêtes ne sont souvent que des collectes déguisées de données qui seront vendues à des fins publicitaires.

La loi suisse édicte des règles: une entreprise doit se procurer les données de manière licite et les traiter uniquement dans le but indiqué. Il lui est interdit de les communiquer à des tiers sans consentement de la personne concernée. Tout savoir sur les spams et comment s'en prémunir sur le site du Préposé.


La vidéosurveillance au travail

Des cas litigieux de surveillance vidéo d'employés ont été révélés ces dernières années, forçant la Confédération à légiférer. La vidéosurveillance au travail ne doit pas avoir pour but de surveiller l'employé. Dans un supermarché par exemple, les caméras doivent être disposées pour ne pas filmer constamment le personnel de vente. En 2006, le Préposé s'était particulièrement intéressé au cas du hard discounter Aldi. Il avait alors édicté plusieurs recommandations. Le détail ici.

La vidéosurveillance s'est également fortement développée dans l'espace public. A lire, une enquête sur le phénomène dans les communes, les transports publics,.. Vidéosurveillance


Les "boîtes noires" pour voitures

Les assureurs s'intéressent de plus en plus au système de "boîtes noires" pour les voitures afin de proposer à leurs clients des formules d'assurance personnalisées. Ces "boîtes noires" enregistrent des données sur le comportement de conduite: les conducteurs prudents auraient une prime moins élevée que les automobilistes ayant une conduite considérée comme plus dangereuse. Le système est appelé PAYD, soit "pay as you drive" ou "payez comme vous conduisez".

Outre le contrôle constant exercé sur le client, ce système comporte le risque que le profil établi soit utilisé dans d'autres assurances (vie, accidents,...). En 2008, le groupe Axa Winterthur a proposé à ses jeunes assurés un rabais de 15% sur leur prime s'ils acceptaient une telle boîte noire. A lire: Automobile


Biométrie et scanners corporels

En mai 2010, le peuple suisse a accepté de justesse l'introduction du passeport biométrique. Ce sésame, qui contient une puce électronique avec deux empreintes digitales et une photo, permet aux ressortissants helvétiques de se rendre aux Etats-Unis pour 90 jours sans devoir faire une demande de visa. A l'époque du vote, les opposants dénonçaient un "fichage obligatoire" et mettaient en garde contre les abus dans l'utilisation des données récoltées.

Autre problématique liée, celle des scanners corporels, qui inspectent les voyageurs dans les moindres détails. Début 2012, le Conseil fédéral a donné son feu vert à l'utilisation de ces appareils, mais leur introduction reste facultative, comme le veut la directive européenne. Pour l'heure, aucun aéroport suisse ne compte en installer. A lire: Les aéroports suisses ne veulent pas de scanners corporels


Google Street View dans nos rues

Le logiciel Google Street View est au centre d'une procédure judiciaire depuis que les véhicules de Google ont commencé à parcourir la Suisse pour les photographier, immortalisant les passants en même temps que les rues. Dernier jugement en date, le Tribunal fédéral a estimé que Google Street View était dispensé de flouter tous les visages et plaques de voitures sans exception. Mais chaque personne peut demander l'anonymisation manuelle de données qui la concernent. A lire: Le Tribunal fédéral dispense Google de flouter tous les visages sans exception


Facebook, vous et vos amis

Le réseau social le plus populaire au monde est la cible de vives critiques des défenseurs de la vie privée depuis sa création. Les utilisateurs y rendent publiques des informations très sensibles. Ils peuvent certes limiter le nombre de personnes ayant accès à ces données, mais une étude a montré que 13 millions d'internautes américains n'utilisaient pas ou ne connaissaient pas l'outil permettant de régler la confidentialité sur Facebook. Ainsi, 4,8 millions d'entre eux ont annoncé qu'ils partaient en voyage à une date déterminée, une information qui peut être utile pour des cambrioleurs.

Le groupe lui-même est pris pour cible pour sa politique de confidentialité. Dernièrement, des internautes américains ont porté plainte contre Facebook pour avoir surveillé leur navigation sur internet même après qu'ils se soient déconnectés du site. Le fondateur Mark Zuckerberg a plusieurs fois reconnu des "erreurs" dans la politique de confidentialité du groupe.


La nébuleuse Google

Le géant Google dispose d'une panoplie de services qui lui offrent une vue très large de la vie de ses utilisateurs. Moteur de recherche (Google), services de géolocalisation (dont Google Maps), messagerie électronique (Gmail), stockage de photographies (Picasa), mise en ligne de vidéos (Youtube),...

Et depuis début 2012, la nouvelle politique de confidentialité du groupe lui permet de regrouper des informations issues de services autrefois séparés. Ce qui a provoqué la colère des défenseurs de la vie privée.

Cécile Rais

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