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Plusieurs recours contre l'appellation protégée de l'absinthe

Absinthe [BRUNO FERRANDEZ]
Absinthe, Fée verte et Bleue ont vu leurs IGP confirmées par Berne. - [BRUNO FERRANDEZ]
Des associations de producteurs d'absinthe français et européens s'opposent à la décision de limiter au Val-de-Travers (NE) l'usage de l'appellation protégée "absinthe". Le Tribunal administratif fédéral devra trancher.

Le Tribunal administratif fédéral a été saisi de plusieurs recours contre la décision de l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG) de limiter l'octroi de l'indication géographique protégée (IGP) de l'absinthe au Val-de-Travers (NE). La Fédération française des spiritueux (FFS) et la Confédération européenne des producteurs de spiritueux font, entre autres, partie des recourants.

A la mi-août, l'OFAG avait rejeté leurs récriminations, en même temps qu'une quarantaine d'autres, arguant que les appellations "absinthe", "Fée verte" et "La Bleue" revêtaient "le caractère de dénominations traditionnelles et non d'une dénomination générique", et qu'elles évoquaient "une eau-de-vie traditionnellement associée au Val-de-Travers (NE)" (lire Indication géographique protégée confirmée pour l'Absinthe).

L'OFAG considère ainsi qu'il n'y a pas lieu d'accepter des demandes d'extension de l'aire géographique vu qu'une tradition n'est pas prouvée dans d'autres régions.

"Absinthe" est un terme générique

De leur côté, les producteurs de spiritueux français et européens affirment dans un communiqué qu'ils ne laisseront pas l'absinthe, rendue célèbre notamment par Rimbaud, "être confisquée en dépit de son histoire". "L'absinthe est avant tout le nom d'une plante utilisée, parmi d'autres, pour l'élaboration de la boisson du même nom", font valoir les concurrents français et européens des distillateurs vallonniers.

La boisson "doit sa renommée au savoir-faire de très nombreux producteurs disséminés à travers le monde, tout particulièrement en France et en Europe", souligne la FFS, ajoutant que ce terme générique ne sert en aucun cas à désigner un produit exclusivement originaire du Val-de-Travers.

Compromis proposé

Si la décision de l'OFAG était validée, il serait impossible à tout producteur extérieur au Val-de-Travers de commercialiser de l'absinthe, non seulement sur le territoire suisse mais aussi sur le territoire de tout pays ayant reconnu l'IGP helvétique dans le cadre d'accords internationaux.

La filière française suggère aux producteurs vallonniers un compromis: privilégier l'enregistrement de la dénomination "Absinthe du Val-de-Travers". Le TAF n'est toutefois pas l'ultime autorité de recours. Sa décision pourra encore être attaquée au Tribunal fédéral (TF).

ats/ptur

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Une histoire mouvementée

Née à la fin du XVIIIe siècle dans le Val-de-Travers (NE), l'absinthe a très vite passé la frontière du Doubs sous la houlette d'Henri-Louis Pernod, avant de connaître la célébrité grâce à ses nombreux amateurs issus du monde des arts.

En Suisse, la Fée verte a été prohibée en 1910, dans la foulée d'un drame survenu en 1905 à Commugny (VD): un homme avait tué sa femme et ses deux enfants dans un accès de démence attribué à l'absinthe.

Si la prohibition n'a été levée qu'en 2005, de nombreuses distilleries clandestines, avant tout dans le Val-de-Travers, ont toutefois maintenu en vie la Fée verte pendant tout le XXe siècle.