On en sait un peu plus sur le collaborateur du Service de renseignements de la Confédération (SRC) qui figure parmi les complices présumés de l'encaveur valaisan Dominique Giroud dans l'affaire de piratage informatique contre Le Temps et la RTS.
Pierre* a été arrêté alors qu'il était en mission en Suisse avec son supérieur hiérarchique. Avant d’exercer sur sol suisse, l’espion avait officié au service extérieur du SRC, ainsi que dans un groupe spécial dédié à la protection de la place financière. Un groupe créé en réaction aux nombreux vols de données bancaires que les banques suisses ont subi ces dernières années, comme avec l’affaire Falciani et la banque HSBC.
Comme chaque collaborateur du SRC, Pierre a fait l'objet d'un contrôle de sécurité régulier. Il a été noté au plus haut niveau (soit 12) sans qu'aucun problème ne soit détecté à l’occasion de ces tests. Fin 2013, alors que l'affaire Giroud démarrait dans les médias, Pierre aurait fait part à ses supérieurs de sa relation amicale avec le vigneron valaisan.
Données monnayées ?
Pour son travail, l’espion fédéral avait accès à une base de données ultrasensibles, le système d’informations relatif à la protection de l’Etat (ou ISIS). Depuis l’éclatement de l’affaire, explique une source proche du SRC, "une analyse approfondie de ses logs (entrées) et ses interrogations sur les bases du SRC sont en cours d’analyse". Au sein du Pentagone suisse, on craint que des données sensibles aient été subtilisées par l’espion indélicat. Contactée par la RTS, la porte-parole du SRC Isabelle Graber refuse de commenter, "ce d'autant plus que les éléments font l'objet des investigations menées par le Ministère public genevois".
Ces craintes sont fondées. Selon la RTS, l’enquêteur privé, aussi sous les verrous dans le cadre de l’affaire Giroud, a obtenu des informations par le biais de Pierre. Il s’agissait, entre autres, de données relatives à des entrées et sorties sur sol suisse de personnes en provenance de Russie. Des informations que le privé a pu aisément revendre par la suite à sa clientèle sur l'arc lémanique, des banques et des études d’avocats.
Liens avec le détective privé?
Selon plusieurs sources, le détective privé également arrêté en même temps que Dominique Giroud (lire ci-contre) ne cachait pas ses liens avec Pierre, l’espion fédéral.
"Il parlait souvent de cette personne et disait recevoir de lui des informations. Il lui avait même proposé de monter ensemble une boîte de renseignements privée, faisant valoir le fait que le salaire serait bien plus important que celui d’un fonctionnaire de la Confédération" indique un privé genevois qui tient à l’anonymat.
Une autre source évoque la création d'une officine de renseignements avec deux autres hommes dont un avocat genevois.
* Pierre, nom d’emprunt
Agathe Duparc/vkiss
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Et: Dominique Giroud restera en détention provisoire jusqu'au 14 juillet
Détective privé connu du milieu
Le petit monde des détectives privés suisses tremble. Le privé genevois arrêté était connu du milieu. La plupart des interlocuteurs de la RTS le décrivent comme un personnage "volubile" et "très bavard". Son agence de renseignements a pignon sur rue à Genève.
Elle propose une gamme traditionnelle de services: de la filature, aux renseignements économiques.
Liens avec les époux Rybolovlev
Le détective privé avait en tout cas la réputation d’avoir des antennes un peu partout. On le retrouve sur plusieurs dossiers brûlants, dont celui du divorce des époux milliardaires Rybolovlev.
A Genève, le détective raconte partout qu’il travaille pour le compte de Madame, à savoir Elena Rybolovleva domiciliée à Cologny et qui vient d’obtenir 4 milliards de dollars dans un jugement de divorce prononcé à Genève.
Contactés par la RTS, les avocats d'Elena Rybolovleva démentent avoir fait appel à ses services.