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Pas de distinction entre idylle de jeunesse et acte pédophile

Les criminels restent-ils fichés? [fotolia - laubelstockphoto]
Introduction du nouvel extrait du casier judiciaire / On en parle / 8 min. / le 13 janvier 2015
Les mesures d'application de l'initiative Marche Blanche ne font pas de distinction entre acte pédophile et idylle de jeunesse, contrairement à ce qui était promis lors de la campagne, prévient un expert.

Les mesures entrées en vigueur au 1er janvier 2015, censées appliquer l’initiative de la Marche Blanche "pour que les pédophiles ne travaillent plus avec des enfants" acceptée en votation populaire le 18 mai 2014, ne font pas de distinction entre un acte pédophile et une simple idylle de jeunesse entre un jeune adulte de 18 ans et une mineure.

C’est l’appréciation de l'avocat Laurent Moreillon, professeur associé à la Faculté de droit et des sciences criminelles de l’Université de Lausanne, invité de l’émission radio de la RTS On en parle mardi.

Ces mesures – une modification du Code pénal et de l’ordonnance sur le casier judiciaire – préfigurent une nouvelle loi qui entrera en vigueur ultérieurement. Elles prévoient la mention dans le casier judiciaire d’une interdiction de travail avec des mineurs.

Toute condamnation assortie d'une interdiction

Or, la loi ne semble pas prévoir de dissociation entre cette mention d'interdiction de travail et la condamnation. Le nouvel article 67 du Code pénal stipule en effet que "le juge interdit", et non que "le juge peut interdire", observe Laurent Moreillon. "On est donc ici en présence d’une obligation assez claire prononcée par le législateur".

En d’autres termes, toute condamnation devrait être assortie d’une interdiction de travailler avec des jeunes mineurs, même s’il s’agit d’une condamnation pour une aventure entre un jeune adulte et une adolescente mineure.

Surprise

"Il y aura peut-être des cas que la jurisprudence affinera, tempère Me Moreillon. Mais quand on lit le texte comme ça, on est assez surpris de son contenu."

Autre surprise relevée par le professeur de droit: le message du Conseil fédéral qui explicite le texte ne parle pas de majorité sexuelle, mais définit une personne mineure comme une personne qui n’a pas la majorité.

"Donc une potentielle victime qui aurait 17 ans, 11 mois et 29 jours serait visée dans ce contexte-là, en déduit Laurent Moreillon. Reste à voir comment les tribunaux vont appliquer cela", conclut-il.

Philippe Girard/sbad

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