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"Les visites d'amitié françaises doivent se transformer en actes"

Didier Burkhalter, photographié le 9 mars 2015, lors de la session de printemps des Chambres fédérales. [Keystone - Alessandro della Valle]
Didier Burkhalter, chef du Département fédéral des Affaires étrangères / L'invité de la rédaction / 24 min. / le 14 avril 2015
A la veille de la venue du président français en Suisse, le conseiller fédéral Didier Burkhalter a estimé mardi sur les ondes de la RTS que la détente obtenue avec son voisin devait se concrétiser par des accords.

"Les relations entre voisins, ça se soigne. Les problèmes de voisinage sont normaux mais il faut en parler ouvertement et souvent", a estimé mardi le chef du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) Didier Burkhalter, interrogé dans le Journal du matin de la RTS, alors que François Hollande est attendu à Berne, Zurich et Lausanne mercredi et jeudi pour une visite d'Etat.

Le conseiller fédéral, qui a souligné l'importante détente avec la France ces dernières années, souhaite désormais transformer l'essai en signant des accords sur plusieurs points.

On cherche des intérêts communs, des ponts mais il faut aussi affronter les vrais enjeux: l'emploi, l'immigration ou la recherche, que l'on gère de manière différente de part et d'autre de la frontière.

Didier Burkhalter, conseiller fédéral

Le Neuchâtelois espère que la visite de François Hollande permettra à plusieurs dossiers importants pour la Suisse d'avancer: la question de la gestion de l'aéroport de Bâle-Mulhouse, celle de la politique fiscale et de l'échange automatique d'informations, des échanges commerciaux ainsi que la question de la libre circulation des personnes en lien avec la votation du 9 février et la thématique des frontaliers.

Taxation et fiscalité de Bâle-Mulhouse

Dans le dossier de l'aéroport de Bâle-Mulhouse, Didier Burkhalter a expliqué qu'il restait quelques points à éclaircir comme celui de la fiscalité des entreprises et de la possibilité d'imposer la TVA suisse sur sol français.

"La question du statut de l'aéroport et de celle du secteur douanier sont réglées et nous allons déjà signer un accord de principe avec Laurent Fabius demain par lettres interposées".

Paix fiscale en vue?

En matière fiscale, le conseiller fédéral a estimé que la Suisse ne faisait pas de concession et qu'elle s'engagerait à respecter les standards internationaux dès que d'autres places financières importantes le feraient également.

"La Suisse s'adapte aux réalités économiques alors que des tempêtes se sont abattues sur l'économie suisse et mondiale et que des crises sécuritaires ont éclaté. Mais la stabilité de notre pays est un atout".

Les intérêts économiques et la concurrence restent toutefois forts, a relevé Didier Burkhalter en se disant optimiste pour le système suisse.

Trop de frontaliers?

"Plus de la moitié des frontaliers en Suisse sont des Français. Ils participent  à la vie de notre société", a rappelé le chef du DFAE, précisant que le climat d'amitié avec les voisins de la Suisse était essentiel pour négocier une position permettant de mieux maîtriser l'immigration tout en continuant sur la voie bilatérale.

Malgré une certaine intransigeance de la France, les relations intensifiées devraient permettre d'aboutir à une solution viable pour les deux Etats. "La France doit se concentrer sur la création d'emplois et libérer son économie pour se redynamiser", a encore analysé le conseiller fédéral. (cf. ci-dessous)

"J'aime la France"

Didier Burkhalter a enfin tenu à rappeler l'importance de la France pour la Suisse et inversement.

"J'aime beaucoup la France, sa richesse culturelle et humaine, ses valeurs de paix que nous partageons largement en Suisse mais il est clair que le monde des relations internationales reste aujourd'hui un monde très dur. Il n'existe pas de réelles amitiés entre les Etats mais seulement des gestes d'amitié. Par nos collaborations, nous avons la volonté d'aller de l'avant ensemble".

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Les "leçons" de Didier Burkhalter à la France

"J'aimerais que la France soit plus ouverte à une vision libérale de l'économie, qui crée des emplois plutôt que de les empêcher. J'aimerais que la France se libère, en quelque sorte, en matière de dynamisme économique", a estimé Didier Burkhalter.

"Il y a 24% de chômage des jeunes en France. C'est dramatique. Il y a des problèmes de ghettoïsation énormes. Cela ne va pas changer en trois mois. Ca implique une capacité de travailler en stabilité politique", a ajouté le ministre des Affaires étrangères.

"Il y a beaucoup de travail en France (...). Dans beaucoup de domaines, on peut peut-être aussi apporter des solutions", selon le Neuchâtelois.

"Quand je parle de l'intégration, quand je parle de l'innovation, la Suisse intéresse beaucoup la France, et c'est pas étonnant car c'est là qu'il y a les plus grands problèmes en France", a-t-il jugé.