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Le National multiplie les allègements fiscaux pour les entreprises

La troisième réforme de l’imposition des entreprises déchire le Parlement
La troisième réforme de l’imposition des entreprises déchire le Parlement / 19h30 / 2 min. / le 16 mars 2016
La majorité de droite au National a multiplié mercredi et jeudi les largesses fiscales dans la 3e réforme de l'imposition des entreprises. La facture avoisine 1,5 milliard de francs rien que pour la Confédération.

L'une des options envisagée pour que la Suisse reste fiscalement attractive, qui n'est pas pas inscrite dans la loi fédérale, est de réduire le taux d'imposition des sociétés au niveau cantonal. Certains, comme Vaud et Genève, se sont déjà engouffrés dans cette brèche. Les citoyens vaudois se prononceront d'ailleurs dimanche.

>> Lire : Que prévoit la réforme de l'imposition des entreprises à la sauce vaudoise?

Une autre option est le recours à un nouveau système de "patent box", qui devrait permettre une imposition préférentielle des revenus des brevets et d’autres droits comparables.

Autres largesses

D'autres largesses sont prévues. Les cantons auront aussi la possibilité de relever les montants des déductions accordées sur les dépenses consenties en faveur de la recherche et du développement. Et la droite n'a pas hésité à charger le bateau malgré les appels à la retenue du ministre des Finances Ueli Maurer.

Les députés se sont prononcés pour un modèle d'impôts sur le bénéfice corrigé des intérêts entraînant des pertes fiscales de 266 millions pour la Confédération et pouvant aller jusqu'à 344 millions côté cantons. Ils ont aussi introduit une taxe forfaitaire au tonnage qui frapperait les sociétés maritimes en lieu et place des impôts sur le bénéfice et le capital. La Confédération devrait y perdre 5 millions tout comme les cantons.

La droite a aussi obtenu qu'une réduction de l'impôt sur le capital des entreprises puisse aussi être accordée aux holdings. Enfin, le National n'a pas souhaité plafonner séparément les allègements liés à la "patent box" et aux investissements dans la recherche.

Deux dossiers scindés

Le manque à gagner fiscal de 228 millions de francs lié à la suppression du droit de timbre d'émission sur le capital propre ne devrait pas s'ajouter aux quelque 1,45 milliard de francs que la Confédération risque de perdre avec la réforme de l'imposition des entreprises.

La majorité de droite, avec l'aval du Conseil fédéral, a enfin décidé de ne pas inclure dans la réforme la suppression du droit de timbre d'émission sur le capital propre, qui représente un manque à gagner fiscal de 228 millions. La gauche a dénoncé une combine pour mieux faire avaler les allègements fiscaux.

Menace de référendum

Reste que les allègements votés représentent des pertes fiscales de 1,5 milliard de francs environ rien que pour la Confédération. De quoi faire bondir la gauche qui réclame depuis des mois que l'exercice ne se solde pas sur le dos des contribuables et qui brandit la menace du référendum.

Les efforts du camp rose-vert pour compenser au maximum le manque à gagner sont restés vain. La gauche n'a pas réussi à obtenir l'introduction d'un impôt sur les gains en capital, qui pourrait rapporter des centaines de millions à la Confédération et aux cantons. Elle n'a pas eu plus de succès en soutenant une hausse de l'imposition des revenus issus de paiements de dividendes.

>> Le point sur les gagnants de la réforme :

Les entrepreneurs suisses devraient être les gagnants de la réforme sur l’imposition des entreprises
Les entrepreneurs suisses devraient être les gagnants de la réforme sur l’imposition des entreprises / 19h30 / 1 min. / le 16 mars 2016

Pas de cadeau aux cantons

Les cantons risquent de faire grise mine: contrairement au Conseil des Etats, le National a refusé jeudi par 99 voix contre 89 et 4 abstentions de leur consentir un coup de pouce pour compenser la facture de la réforme.

L'idée de départ du Conseil fédéral était que Berne éponge la moitié des pertes fiscales des cantons, soit un milliard de francs. Pour ce faire, il proposait d'augmenter la part cantonale à l'impôt fédéral direct de 17% à 20,5%. Les Etats voulaient quant à eux faire passer cette part à 21,2%.

>> Le suivi des débats :

ats/fme

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Une réforme sous pression internationale

La troisième réforme de l'imposition des entreprises n'est pas contestée en soi. Vu la pression internationale, la Suisse est obligée d'agir.

L'ODCE et l'UE ne veulent plus de la concurrence "déloyale" qui fait bénéficier les entreprises étrangères sises sur territoire helvétique de statuts spéciaux. Ces derniers vont donc disparaître.

Pas moins de 24'000 sociétés, qui représentent de 135'000 à 170'000 emplois et plusieurs milliards de francs de recettes fiscales, sont concernées, a souligné Céline Amaudruz (UDC/GE) au nom de la commission.

Pour ne pas tuer la poule aux oeufs d'or, de nouvelles largesses, compatibles avec les règles internationales, devraient donc être accordées à toutes les entreprises, suisses et étrangères.

Péréquation financière modifiée

La réforme entraînera par ailleurs des changements du côté de la péréquation financière. Le calcul se fera sur d'autres bases.

Les bénéfices des entreprises profitant des statuts fiscaux spéciaux ne sont actuellement pris en compte que partiellement dans le calcul du potentiel de ressources d'un canton.

En supprimant ces statuts, on devrait répercuter les bénéfices à 100%. Des cantons comme Bâle-Ville ou Vaud se retrouveraient tout d'un coup bien plus riches sur le papier et seraient appelés à payer davantage. Pis, tout l'équilibre du système serait affecté.

La nouvelle méthode de calcul permettra d'éviter ce phénomène.