"Que chaque paroisse, chaque communauté religieuse, chaque monastère, chaque sanctuaire d'Europe accueille une famille". L'appel politique du pape François, le 6 septembre dernier, a aussitôt résonné dans les églises de Suisse romande.
Mgr Charles Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg, a immédiatement demandé aux vicaires épiscopaux de relayer la demande du pape. "Un élan de solidarité extraordinaire s'en est suivi dans la population", assure la porte-parole du diocèse, affirmant que de nombreuses familles se sont portées volontaires pour ouvrir leur porte aux migrants. Mais qu'en est-il des paroisses elles-mêmes?
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Aucune famille à Genève ou Neuchâtel
L'abbé Pascal Desthieux, vicaire épiscopal du canton de Genève, confirme qu'il y a eu un grand engouement en septembre, suite à l'appel du pape, "puis c'est un peu retombé". Egalement curé à la paroisse Saint-Joseph, il affirme être en train de régler "tous les aspects pratiques" pour accueillir une personne venue d'Erythrée. Reste les 42 autres paroisses du canton.
D'après le porte-parole de l'Hospice général, onze familles - sur plus de 60 inscrites - hébergent actuellement une quinzaine de réfugiés, tandis que seules "deux ou trois" paroisses de communes l'ont approché, pour des projets qui n'ont pas encore abouti.
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A Neuchâtel, le directeur du Service cantonal des migrations Serge Gamma affirme qu'il n'y a actuellement aucun réfugié hébergé dans des paroisses catholiques ou protestantes. "L’Eglise évangélique réformée nous a proposé un logement dans des salles pouvant accueillir un grand nombre de personnes, mais il n'était pas adapté, avec un seul sanitaire. Pour des raisons logistiques, nous avons dû décliner leur proposition", explique-t-il.
Vaud privilégie d'autres actions
Michel Racloz, délégué du vicaire épiscopal du canton de Vaud, affirme que l'appel a bien été transmis dans les paroisses, mais que la priorité n'était pas au logement. "Nous travaillons plutôt sur l'accueil, l'accompagnement et l'intégration des migrants en précarité", favorisant des programmes de parrainage, en partenariat avec des associations.
Aussi, la volonté politique du canton serait de regrouper les requérants d'asile dans des hébergements collectifs, explique Michel Racloz: "Nous n'avons pas été très proactifs pour accueillir des requérants à domicile, en raison de ce que nous entendions au niveau politique".
Nous n'avons pas été très proactifs pour accueillir des requérants à domicile
L'Eglise évangélique réformée du canton de Vaud avait de son côté proposé au gouvernement cantonal six à huit cures inhabitées pour l'accueil des migrants. Le Conseil d'Etat avait refusé cette proposition, pour des questions "organisationnelles".
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Fribourg, le bon élève
"Beaucoup de paroisses nous ont contacté suite à l'appel du pape", a affirmé Claude Gumy, directeur de la société ORS service, qui encadre les réfugiés et requérants d'asile. Selon lui, une "bonne vingtaine de paroisses, d'union paroissiales et de congrégations ont répondu à la demande du vicaire Rémy Berchier. Ensemble, ils hébergent une quarantaine de personnes, principalement d'Irak, d'Iran, de Syrie et d'Erythrée.
A côté de l'accueil, Claude Gumy précise qu'il existe de nombreux groupes d'encadrement liés aux paroisses pour accompagner les migrants. Ils leur proposent des soutiens pour l'intégration, des cours de langue, des transports pour ceux qui habitent loin des commerces. "Sans cela, on hésiterait à placer une famille loin de tout".
"J'ai peut-être pris à la lettre la demande du pape", affirme le vicaire de Fribourg Rémy Berchier, ajoutant avoir écrit à chacune des paroisses, dans le but de les sensibiliser à la question des réfugiés. "Il y a eu une énorme réflexion de fond sur leur condition et sur la meilleure manière de les accompagner".
J’ai peut-être pris à la lettre la demande du pape.
Quant au Valais, deux cures hébergent des réfugiés. L'une a pris en charge une femme et ses trois enfants tandis que l'autre accueille un jeune homme. Selon Robert Jaggi, responsable-adjoint à l'Office cantonale de l'asile, l'appel du pape ne s'est que légèrement fait ressentir dans le canton. "Plutôt qu'un besoin en place de logement, nous avons demandé à recevoir une aide pratique, par exemple, pour trier des habits.
Feriel Mestiri