Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) affronte une nouvelle affaire touchant un de ses diplomates. Elle concerne l'actuel chef du personnel Jacques Pitteloud, rattrapé par un dossier datant de l'époque où il était ambassadeur au Kenya.
Deux très riches hommes d’affaires de ce pays l’accusent de tentative de contrainte. Le diplomate leur avait proposé de verser 50 millions de francs en échange de l’abandon de poursuites pénales contre eux en Suisse pour une affaire de corruption et de blanchiment.
Pas de mandat officiel pour négocier
Or ce rôle de négociateur se retourne aujourd’hui contre Jacques Pitteloud, puisque le Tribunal pénal fédéral lui reproche d’avoir agi sans mandat officiel. Selon un arrêt daté du 29 juin dernier, l'ambassadeur n'avait pas de mandat officiel pour négocier en 2014 avec les hommes d'affaires. Le journal kényan Daily Buisness cite un extrait du document: "Il est intervenu sans avoir obtenu de mandats des autorités suisses pour le faire. Son action est donc illégitime."
Une source proche du dossier a confirmé à la RTS la véracité de cet extrait et ajoute que le TPF se base sur un élément de preuve d'octobre 2014 qui indique "que le Ministère public n'a jamais donné d'instruction à l'ex-ambassadeur pour intervenir dans cette affaire".
Mais cette version contredit complètement la ligne de défense adoptée par Jacques Pitteloud dans les médias kényans depuis 2014. Contacté par la RTS, il se dit très surpris de la version retenue par le TPF mais refuse pour l'instant de commenter.
Le DFAE soutient entièrement son diplomate
Le diplomate peut cependant compter sur le soutien total du DFAE et de son chef Didier Burkhalter, selon le chef de la communication du département Jean-Marc Crevoisier. Ce dernier précise que "cette opération s'est faite avec le soutien du département en concertation avec le Ministère public de la Confédération."
Le parquet fédéral avait pourtant d'abord classé la plainte déposée en mai 2015 par les hommes d'affaires kényans contre Jacques Pitteloud. Mais la décision a été cassée par les juges de Bellinzone qui ont ordonné l'ouverture d'une enquête contre le diplomate.
Dossier désormais en mains du DFJP
L'arrêt, qui n'est pas encore public, met dans l'embarras tous les acteurs de cette opération. Dans l'immédiat, la balle est dans le camp du Département fédéral de justice et police (DFJP). C'est lui qui doit autoriser ou non l'enquête contre Jacques Pitteloud, comme à chaque fois qu'un employé de la Confédération est visé par une plainte pénale.
Stéphane Deleury/oang