Depuis cet été, les clients de l'assurance CSS peuvent bénéficier d'un rabais allant jusqu'à 146 francs par an. Il leur suffit d'effectuer 10'000 pas quotidiennement, soit environ 6km, suivant les recommandations de l'Organisation mondiale de la santé.
Chaque soir, les données enregistrées sur le compteur de pas porté par l'assuré sont envoyées à l'assureur. Quelque 2500 participants ont déjà souscrit à cette offre, adressée uniquement aux clients possédant une assurance complémentaire.
En raison du principe de solidarité, un tel système serait interdit pour l'assurance de base. Des personnes handicapées, par exemple, ne pourraient pas effectuer 10'000 pas.
"Le casse du siècle"
La réaction du préposé fédéral suppléant à la protection des données et à la transparence ne s'est toutefois pas faite attendre sur Twitter:
Au-delà du principe de solidarité, Sébastien Fanti, préposé valaisan à la protection des données, estime que "la CSS est en train de réaliser le casse du siècle en récoltant des données très importantes pour seulement 10 francs par mois."
Ce décompte n'est pas anodin, selon lui. Car la CSS assure aussi le risque troisième pilier, notamment. "Que se passera-t-il lorsque nos données dévoileront une santé fragile?"
Aux Etats-Unis, Apple a déjà vendu à 15 assurances médicales les données récoltées sur la santé.
Système de bonus-malus
Pour Sébastien Fanti, le programme de la CSS n'est que la première étape pour récolter toutes les données personnelles: "Aujourd'hui, on compte nos pas. Mais demain, ils verront si on a grossi, si on a mangé du chocolat ou si on a mal dormi."
Interrogée sur ce sujet, la porte-parole de la CSS Nina Mayer répond que, "pour l'instant, ce n'est pas notre objectif de jouer avec le système des bonus-malus. C'est un programme de prévention dont le but est de stimuler les assurés."
Consentement volontaire
Pour garantir la protection des données, l'assurance a conclu un contrat avec différentes entreprises qui fabriquent ces podomètres. "Nous nous sommes arrangés avec eux pour qu'ils ne nous transmettent que ces données-là", explique Nina Mayer. Les clients, eux, doivent signer une décharge attestant qu'ils acceptent cette récolte de données.
Silvia Böhlen Chiofalo, porte-parole du préposé fédéral à la protection des données, note que le consentement de l'assuré doit se faire sur une base volontaire: "Les assurés ne doivent pas se sentir obligés de choisir un tel modèle, par exemple à cause d'une contrainte financière".
L'autre risque, selon elle, concerne la transparence du traitement des données. "Les assurés doivent être informés en détail: quelles données sont utilisées à quelle fin? Sont-elles transmises à des tiers? Quelle est la durée de conservation?", précise-t-elle.
Or, pour Sébastien Fanti, ces données traitées aujourd'hui seront gardées précieusement pour ressortir demain, "à nos dépens".
Feriel Mestiri