En préambule, la cheffe du Département fédéral de justice et police (DFJP) a parlé d'une "situation insoutenable à Come (…), qui ne doit plus jamais exister en Europe". Mais elle a ensuite déroulé, en cinq points, un argumentaire à la logique implacable et pragmatique. Inutile de s'attrister, il faut trouver des solutions à cette situation nouvelle: aujourd'hui, beaucoup de migrants veulent aller vers le Nord de l'Europe ou l'Allemagne, et donc uniquement passer par la Suisse sans y rester.
Pas question de laisser passer les migrants
Mais pour la conseillère fédérale, qui l'a répété plusieurs fois dans son discours, traverser la Suisse n'est pas une option. "La Suisse ne veut pas devenir un pays de transit", a-t-elle martelé.
Elle ne le peut pas, parce qu'il s'agirait d'une entrave aux accords de Dublin, qui serait en plus difficile à justifier auprès de l'Allemagne. Et la Suisse ne le veut pas non plus, parce que ce serait déplacer le problème plus loin, par exemple en Suisse, aux portes de l'Allemagne. Et cela ne résoudrait rien, estime la conseillère fédérale. Les services de la cheffe du DFJP rappellent également que l'Allemagne accueille déjà 1 million de réfugiés alors que l'Italie en accueille seulement 100'000.
Pour les migrants contraints de dormir dans un parc à Côme, la seule option est de déposer une demande d'asile en bonne et due forme - en Italie ou en Suisse. Et la ministre socialiste rappelle les règles: ils peuvent le faire s'ils veulent un accueil mais ils ne pourront pas choisir le pays dans lequel ils veulent aller.
C'est l'autre point sur lequel Simonetta Sommaruga insiste: il faut plus de solidarité entre pays européens, avec une clé de répartition. "Malheureusement l'Europe n'a toujours pas de solution convaincante face à la situation - certes très complexe - de la crise des migrants (…) L'Europe a besoin d'une clé de répartition durable et tous les Etats membres de Dublin doivent prendre leurs responsabilités". Mais il faut être réaliste, ajoute Simonetta Sommaruga: "Cette solution, qui est la meilleure pour l'Europe, a peu de chances de passer auprès de tous. Mais j'espère au moins que l'Europe propose très vite une amélioration."
De la parole aux actes
L'absence de solution convaincante ou la nécessité d'avoir une clé de répartition. Ce discours n'est pas nouveau de la part de la ministre. Mais aujourd'hui, elle fait en quelque sorte pression sur l'Union européenne pour qu'elle trouve un mécanisme solidaire entre pays européens dans l'accueil des migrants. Et elle passe à l'acte en appliquant strictement les accords de Dublin, quitte à ce que des migrants restent bloqués pour un temps aux portes de la Suisse.
Les propos de Simonetta Sommaruga font réagir les organisations de défense des réfugiés, d’autant plus qu’ils sont tenus par une ministre socialiste.
>>> Ecoutez la réaction d'Amanda Ioset, secrétaire politique de Solidarité sans frontières, dans l'émission Forum:
Alexandra Richard/oang
>> Ecouter aussi : Les autorités italiennes craignent un "effet Calais" à leurs frontières
Baisse drastique des demandes d'asile d'Erythréens
Les nouvelles demandes d'asile déposées en Suisse au mois de juillet ont nettement diminué par rapport au même mois de 2015. Elles ont reculé de 36,4%. C'est essentiellement lié à une baisse sensible des demandes d'asile de migrants érythréens.
Le mois dernier, le nombre de demandes d'asile d'Erythréens a reculé de 1392 par rapport à la même période en 2015, a indiqué jeudi le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM). Plusieurs raisons expliquent cette évolution.
La première est que le nombre d'Erythréens qui ont atteint le sud de l'Italie par la Méditerranée centrale au cours des sept premiers mois de l'année a diminué de moitié par rapport à 2015.
En outre, cette année environ un tiers des migrants en provenance d'Erythrée ont déposé une demande d'asile en Italie, soit une proportion nettement supérieure à celle de 2015. Enfin, l'Allemagne enregistre elle aussi un nombre croissant de demandeurs d'asile érythréens.