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Yannick Buttet: "l'Occident, n'est plus tout à fait une zone de paix"

Le conseiller national PDC valaisan Yannick Buttet. [Keystone - Gaëtan Bally]
Le conseiller national PDC valaisan Yannick Buttet. - [Keystone - Gaëtan Bally]
Pour le conseiller national Yannick Buttet (PDC/VS), qui soutient la LRens soumise au peuple le 25 septembre, il est impératif de renforcer les moyens de surveillance des services de renseignement de la Confédération.

RTSinfo: Au nom de la menace terroriste, ne prend-on pas le risque de porter atteinte à la sphère privée des citoyens?

Yannick Buttet, conseiller national PDC valaisan: Cette loi est indispensable quel que soit le moment, mais oui malheureusement le contexte actuel est favorable. En Suisse, nous pensons que nous sommes étanches aux risques terroristes, c'est naïf! Cette loi sur le renseignement ne va pas trop loin, elle est nécessaire, sachant que jusqu'ici il n'y avait rien du tout.

Les motivations idéologiques des opposants sont utopiques. Contrer cette loi c'est privilégier les individus plutôt que la sécurité de la société, c'est innacceptable. Celui qui n'a rien à cacher s'en fiche d'être écouté. Nous restons dans un Etat démocratique.

Vous ne craignez pas de revivre l'affaire des fiches, qui a ébranlé la Suisse à la fin des années 1980?

Le contexte était très différent, la menace aussi. Le monde n'est plus divisé en deux visions  idéologiques. Si le Renseignement veut faire une fiche sur moi, il peut! Il ne s'agit pas de surveiller tous les citoyens, mais de cibler les personnes dangereuses. Le Service de renseignement de la Confédération (SRC) est dépourvu, ce sont les services étrangers qui préviennent la Suisse des menaces, cette situation n'est pas acceptable pour un Etat libre.

Il ne faut pas être naïf, les services étrangers sont actifs dans notre pays. Se reposer sur les autres n'est pas digne de notre pays. Si nous ne pouvons pas anticiper les menaces, nous risquons de nous réveiller avec la gueule de bois. Si nous nous arrêtons aux frontières en matière de sécurité, nous perdons forcément le combat. L'affaire des fiches a probablement freiner les travaux sur le renseignement, le balancier a été trop loin, il faut désormais trouver un juste milieu.

Pour lutter contre le terrorisme ou le crime organisé, ne faudrait-il pas favoriser le renseignement sur le terrain, pour resserrer le périmètre?

Le renseignement est plus proche de "Money Penny" que de "James Bond". Ce n'est pas le but de surveiller tous les citoyens, dont l'immense majorité n'a rien à se reprocher. Nos moyens restent faibles et sont incomparables avec des nations comme la Russie ou les Etats-Unis. La Suisse en est encore au boulier alors que ces pays sont déjà aux microprocesseurs! Mais si nous avons déjà une base légale, c'est bien. Car s'il se passe quelque chose en Suisse, ceux qui sont contre aujourd'hui seront les premiers à râler parce qu'aucune décision ou action n'a été entreprises en amont.

Les gardes-fous sont-ils suffisants? Un simple soupçon pourrait lancer une surveillance préventive.

Nous ne sommes pas du tout dans un Etat totalitaire, on reste dans un Etat démocratique, le risque est relativement faible. Nous sommes bien loin des outils utilisés par les dictatures.

Nous sommes davantage surveillés par les caméras installées dans l'espace public que par les services de renseignement. Cette loi permet d'assurer la sécurité de l'Etat et des citoyens, soit le niveau minimal qu'on peut attendre d'une démocratie. Nous sommes déjà en situation de crise, alors qu'il aurait fallu se préparer bien avant que cette crise ne s'installe.

Mais ne va-t-on pas vers une illusion de sécurité? Les auteurs des attentats de Paris, par exemple, étaient connus des services de renseignements, ce qui n'a pas empêché les attentats.

Le risque zéro n'existe pas et on ne pourra pas empêcher tous les actes terroristes, mais on peut les limiter. On parle peu de tous ceux qui n'ont pas été jusqu'au bout, justement parce qu'ils ont été arrêtés avant.

Le bien-être dont nous bénéficions en Suisse n'est pas tombé du ciel, il faut s'en rendre compte. Nous sommes tellement habitués à la paix dans notre pays que nous n'avons pas conscience que l'Occident n'est peut-être plus tout à fait une zone de paix.

Est-ce que cette loi permet de répondre aux menaces de cybercriminalité à grande échelle qui pèsent sur la Suisse? N'est-ce pas une priorité?

La cyberdéfense fait partie intégrante de la mission des services de renseignement, mais ce n'est pas directement l'objet de la loi soumise au peuple le 25 septembre. Ce n'est dès lors pas un élément mis en avant dans la campagne, mais ça doit évidemment nous interpeller. Nous sommes au milieu du monde et nous sommes aussi ciblés.

La défense des intérêts de la Suisse et des Suisses passent aussi par le contrôle des emails et tous les autres dangers liés à la criminalité sur internet.

Dans le contexte actuel, avec des attentats répétés en Europe, il n'y a quasiment aucun risque d'échec de cette loi devant le peuple?

Je suis assez confiant du résultat, je pense que la population va comprendre la nécessité d'octroyer les moyens indispensables pour l'efficience des services de renseignement.

Ce qui permettra par la suite une mise en oeuvre rapide et offrira aussi à la Suisse la possibilité de soigner ses collaborations sur le plan international. Nous pourrons nous aussi donner des renseignements aux autres Etats et surtout agir sur notre territoire et limiter au maximum la menace.

Lara Gross

>> lire l'interview de Lisa Mazzone (Verts/GE) : Lisa Mazzone: "il s'agit clairement d'une dérive"

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