L'Ordonnance fédérale sur la Poste autorise théoriquement La Poste à abandonner jusqu'à 10'000 habitations.
En 2015, l'entreprise rassurait le Conseil fédéral en affirmant que pour l'année 2013 seuls 828 ménages étaient concernés par la mesure. Ce chiffre est pourtant passé à 897 en 2014 et 1005 en 2015.
Une directive interne à l'entreprise, qu'a obtenue l'émission de la RTS On en parle, laisse même penser que La Poste mène une stratégie délibérée en ce sens: "La mise en oeuvre de restrictions de distribution doit être effectuée de manière prudente et progressive, afin d'éviter une levée d'oppositions politiques qui pourrait conduire à un changement de loi ou d'ordonnance".
"Inadmissible pour un service public"
Auteurs d'une motion intitulée "Du courrier pour tout le monde!", les conseillers nationaux neuchâtelois Raymond Clottu (UDC) et Jacques-André Maire (PS) estiment que la situation est inadmissible. La session de septembre du Conseil national se penchera sur leur motion.
"Cela ne correspond pas à ce que La Poste avait annoncé, a réagi Raymond Clottu. La Poste doit continuer à effectuer un service public universel. Le fait de tenter d'en sortir discrètement est tout à fait inacceptable".
De son côté, Jacques-André Maire a souligné le manque de dialogue et de transparence de La Poste qui agit souvent sans consulter et avertir au préalable clients et autorités communales. "Le Conseil fédéral doit prendre une position claire et forcer La Poste à mener un véritable dialogue".
Solutions alternatives proposées
Au micro de la RTS, la porte-parole de La Poste, Nathalie Dérobert Fellay, a tenu à rappeler lundi que La Poste ne s'était fixé aucun objectif chiffré en ce qui concerne le nombre d'habitations touchées par la non-distribution à domicile.
>> La carte des zones potentiellement exclues par les services de La Poste, datant de janvier 2015:
"Nous agissons avec retenue à ce sujet parce que nous savons que c'est un sujet sensible. Mais 1005 maisons, cela ne représente que 0,06% du total de 1,7 million de maisons desservies par La Poste. Ce sont souvent des fermes particulièrement isolées et difficiles d'accès, qui peuvent présenter des dangers pour le personnel de La Poste ou pour nos véhicules (verglas en hiver, chemin de montagne escarpé, éboulements, etc.)".
La porte-parole a aussi insisté sur le fait qu'une solution alternative avait été trouvée pour la distribution du courrier de chacune de ces 1005 maisons: "soit le courrier est distribué chez un voisin ou dans une case postale. Le service universel, nous voulons et nous continuerons à le faire. Rien n'a changé ces dernières années, il n'y a pas de durcissement de la pratique", a encore estimé Nathalie Dérobert Fellay.
Pourtant le rapport de la PostCom, l'organe de surveillance de La Poste, relève que "s’il est vrai que le nombre de ménages exclus du service ordinaire de distribution à domicile paraît actuellement minime par rapport au nombre total de ménages desservis, la PostCom n’en a pas moins l’impression que la Poste a durci sa pratique en la matière et qu’il va inévitablement en résulter une augmentation du nombre de ménages exclus."
C'est désormais aux conseillers nationaux de se prononcer au niveau politique.
>> Lire le rapport complet (notamment pp.19-20 pour la section sur la distribution à domicile):
Bastien von Wyss/Yves-Alain Cornu/sbad