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Pourquoi les EPF devancent largement les Unis suisses dans les classements

L'Université de Lausanne occupe le 138e rang mondial du classement QS. [Keystone - Laurent Gilliéron]
Pourquoi les EPF devancent largement les Unis suisses dans les classements / Le Journal du matin / 4 min. / le 13 septembre 2016
Désormais incontournables dans le monde académique, les classements mondiaux placent les EPF loin devant les universités cantonales. C'est notamment parce qu'ils privilégient les sciences exactes aux sciences humaines.

Les écoles polytechniques fédérales de Lausanne et de Zurich figurent en bonne place dans les classements internationaux (rankings) les plus réputés et distancient nettement les universités cantonales. Ainsi, dans le classement QS publié la semaine dernière, l'EPFZ arrive en 8e position, l'EPFL est 14e, tandis que les universités suisses ne pointent qu'à partir de la 80e place (Lausanne est 138e, Bâle 141e.)

Le modèle anglo-saxon privilégié

Cela s'explique notamment par le fait que les critères analysés sont plus favorables aux EPF, dont le modèle et le fonctionnement se rapproche des universités anglo-saxonnes. De manière générale, ces classements prennent davantage en compte les sciences exactes que les sciences humaines.

"Les rankings sont un outil de mesure de la performance académique parmi d'autres, qui sont plutôt adaptés à des universités techniques" note Alexander Nebel, analyste pour le secteur budget et planification de l'EPFL. "Et dans ce sens, ça fait partie de la large palette que l'EPFL a pour mesurer sa qualité académique."

Les Universités cantonales sont pourtant, elles aussi, attentives à ces classements. Car, si les décisions politiques ne se basent pas uniquement sur eux, ils contribuent au débat.

"Une université n'est pas un business"

"Il y a une tendance qui vient en grande partie des Etats-Unis de considérer les universités comme des entreprises qui doivent être rentables", a relevé Nouria Hernandez, rectrice de l'Université de Lausanne, invitée du Journal du matin sur La 1ère. "Je pense qu'une université n'est pas un business, son rôle n'est pas de suivre les règles qui  font vivre une entreprise."

Pour la première femme rectrice de l'université vaudoise "le rôle de l'université c'est d'une part de fournir des gens au service de la société (...) mais l'université doit aussi produire des gens qui vont contribuer à dessiner l'avenir de la société."

 >>Voir l'extrait en vidéo:

Nouria Hernandez: "L'université n'est pas un business"
Nouria Hernandez: "L'université n'est pas un business" / L'actu en vidéo / 1 min. / le 13 septembre 2016

Nouria Hernandez convient que les universités sont obligées de regarder les résultats de ces rankings, mais les relativise. "Il y a 18'000 universités dans le monde, de ces universités il y en a à peu près 5000 qui font de la recherche, de ces 5000, il y en a à peu près 500 qui sont classées, je pense qu'il est important d'être dans les 250 premières universités et là on est tout à fait bien placé.

Moins de moyens cantonaux pour les Unis

L'écart avec les EPF est normal mais il faut veiller à ne pas délaisser les universités souligne Markus Zürcher, secrétaire général de l'Académie suisse des sciences humaines et sociales. Ce dernier constate que les cantons ont moins de moyens financiers pour leurs hautes écoles que la Confédération, qui se concentre sur les EPF. Mais "les 300 premières du classement sont de très bonnes universités", ajoute Markus Zürcher. Cela n'a rien à voir avec la qualité. C'est plutôt en lien avec la concurrence qui vient des nouvelles universités en Asie de l'Est."

Cette nouvelle concurrence ne tient pas compte des réalités politiques européennes. Or la place scientifique suisse met tout en oeuvre actuellement pour rester dans le programme de recherche européen Horizon 2020. Elle pourrait en être exclue si elle n'accepte pas la libre circulation des personnes étendue à la Croatie dans les six prochains mois. Et là aussi les classements jouent un rôle, surtout en termes d'image.

"On remarque dans les derniers rankings que les universités anglaises souffrent déjà un peu du Brexit" constate Antonio Loprieno, ancien recteur de l'Université de Bâle et ancien président de la Conférence des recteurs des universités suisses. Ce dernier insiste en conséquence sur l'importance pour la Suisse de maintenir sa participation aux programmes européens comme Horizon 2020.

Ne pas oublier l'enseignement de base

De l'avis de ces trois observateurs, il faut différencier - dans ce monde académique lui aussi globalisé - l'excellence (la recherche de pointe) et la qualité de l'enseignement de base, qui reste l'une des missions centrales des universités cantonales mais qui intéresse moins les auteurs des grands classements internationaux.

Rouven Gueissaz/oang

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