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"Il faut interdire tous les pesticides si on veut une durabilité à long terme"

2000 tonnes de pesticides sont utilisées chaque année en Suisse. [AFP - Philippe Huguen]
Le plan de réduction des pesticides sous le feu des critiques / Le Journal du matin / 8 min. / le 27 octobre 2016
La Confédération veut réduire l'utilisation des pesticides de 30% avec un plan d'action mis en consultation jusqu'à vendredi. Un plan jugé trop flou pour beaucoup. Une initiative fédérale s'apprête à être lancée, a appris la RTS jeudi.

L'orientation globale du plan de la Confédération, dévoilé en juillet, consiste à réduire de moitié les risques liés aux pesticides d'ici dix ans. Mais diminuer de moitié les risques ne veut pas dire diminuer de moitié la quantité de pesticides utilisés. Elaboré par l'Office fédéral de l'agriculture avec d'autres offices fédéraux, le plan est jugé trop flou et pas assez scientifique par ses détracteurs.

"Ce plan ne va pas assez loin, il faut aller jusqu'à une interdiction totale des pesticides si on veut une durabilité sur le long terme", relève Edward Mitchell, professeur en biologie des sols à l'Université de Neuchâtel, dans le Journal du matin de la RTS.

Protéger l'agriculture suisse

Contacté par un groupe de citoyens soucieux de l'environnement et de l'impact de ces produits sur la santé, le professeur neuchâtelois est devenu le fer de lance d'une nouvelle initiative qui doit être lancée officiellement dans les prochaines semaines.

Le plan d'action du gouvernement n'est pas le bon outil pour protéger le marché de l'agriculture suisse

Edward Mitchell, professeur de biologie à l'Université de Neuchâtel

"La récolte de signatures va bientôt commencer. Notre but est d'interdire l'utilisation de pesticides de synthèse en Suisse, ainsi que l'importation de produits qui auraient été conçus avec des pesticides", a expliqué Edward Mitchell.

Il s'agit de ce fait de "protéger l'agriculture suisse d'une concurrence de l'agriculture non bio", poursuit-il.

Initiative apolitique

"La démarche est ambitieuse, mais elle sera valable sur le long terme", soutient encore le biologiste, qui assure que le contenu de nos assiettes ne devraient pas être fondamentalement différent. "Et si certaines cultures posent problèmes, il faut s'interroger sur leur pertinence, à savoir s'il est moralement défendable de conserver des cultures qui mettent en péril l'environnement ou la santé des consommateurs."

Il n'y aura pas grand chose de différent, les magasins bio ou restaurants bio proposent des produits et des menus tout à fait défendables.

Edward Mitchell, biologiste

L'initiative est apolitique mais Edward Mitchell dit avoir déjà récolté un large soutien. "Des personnes de tous les bords politiques nous ont soutenu dans la phase de préparation. Et l'idée est vraiment d'éviter un clivage gauche droite ou écolo et non-écolo, car la question dépasse réellement tout cela", conclut-il.

>> En mai dernier, Fernand Cuche s'était aussi exprimé longuement sur l'interdiction des pesticides au micro de la RTS. Lire : "A terme, l’utilisation des pesticides est condamnée", selon Fernand Cuche

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Les conséquences des pesticides

"Certains de ces pesticides sont des produits très toxiques, mais cela dépend beaucoup du dosage", note Edward Mitchell, qui relève que les agriculteurs sont les premiers touchés dans leur santé par ces problèmes, avant même les consommateurs.

"Pour être mis sur le marché, des tests sont effectués sur ces produits, mais on se rend compte souvent 10 ou 20 ans plus tard qu'ils sont en fait beaucoup plus toxiques que ce que l'on pensait".

Et de relever que les problèmes sont difficiles à mettre en évidence, car les effets sont subtils et fonctionnent de manière cumulative.