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Les carrés confessionnels musulmans désertés dans les cimetières suisses

Le cimetière du Boix-de-Vaux doit accueillir un carré musulman d'ici le début de l'année prochaine. [Jean-Christophe Bott]
Intercités - Les carrés musulmans sont de plus en plus désertés / InterCités / 6 min. / le 21 novembre 2016
Les carrés confessionnels musulmans, une trentaine en Suisse, sont largement dépeuplés. Les formules de rapatriement avantageuses, ainsi que le recours aux cimetières laïcs, expliqueraient ce désintérêt.

Dans les carrés confessionnels musulmans, de plus en plus nombreux en Suisse, l'offre dépasse déjà largement la demande. A Saint-Gall, seules une douzaine de places sont occupées sur les 500 que compte le carré musulman municipal.

Ailleurs, comme à Bremgarten (BE), le taux d'occupation monte à un petit tiers. Pareil à Lugano, pourtant l'un des premiers carrés de Suisse, où plus des deux tiers du cimetières sont toujours disponibles, alors que cet espace existe depuis plus de 15 ans.

Recours aux cimetières laïcs

De nombreux musulmans se font ensevelir dans un cimetière laïc, faute d'alternative. "En Suisse allemande, on ne peut être enterré dans un cimetière musulman que si l’on paie ses impôts dans une commune qui offre cette possibilité", explique Enver Fazliji, co-propriétaire de la plus grande entreprise de pompes funèbres islamique de Suisse.

"Lorsque ce n’est pas le cas, et que la famille veut rester proche de son défunt, les gens font des compromis. Même si la tombe ne peut pas être orientée vers la Mecque."

Rapatriement avantageux financièrement

L'argument financier joue aussi un rôle important. Le rapatriement des dépouilles est en effet si avantageux qu'il oppose une sérieuse concurrence aux carrés confessionnels.

En Suisse, même le plus humble des enterrements coûte des milliers de francs. Or, pour quelques dizaines de francs de cotisation par année, une famille entière peut s'assurer pour la couverture intégrale des frais liés au rapatriement. C'est la possibilité donnée aux Turcs de Suisse.

Assurance pour toute la famille

"Ils versent 65 à 70 francs par année et par famille dans un fonds", explique Enver Fazliji. "Si un décès survient, l’assurance me contacte. Je vais chercher le défunt, je le lave, je prépare les papiers, organise le transport et réserve le vol, jusqu'à la prise en charge en Turquie. Les proches n'ont plus rien à faire."

Le tout, avec deux billets d’avion pour permettre à des proches d'accompagner le cercueil.

Prestations bientôt étendues

A noter que selon les informations de la RTS, l'assurance de rapatriement réservée pour l'heure à la communauté turque sera étendue aux musulmans de toutes les nationalités dès l'an prochain. La Tunisie, de son côté, prend en charge, via ses ambassades, l'organisation et les frais liés au rapatriement de ses ressortissants à l'étranger.

Pas un problème d'intégration

Pour Pascal Gemperli, président de l'Union vaudoise des associations musulmanes, cette pratique ne reflète pas pour autant un problème d'intégration.

"Ceux qui se font encore rapatrier aujourd'hui sont des personnes qui ont encore leur famille au pays et qui veulent se faire enterrer chez eux pour des motifs familiaux. Si on pense à la nouvelle génération qui est maintenant ici avec sa famille, la donne a changé. Cela va aller très vite pour elle."

Nicole della Pietra/kkub

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