Dans un télégramme du 17 janvier 1950, le président suisse Max Petitpierre informait son homologue chinois Mao Tsé-Toung que la Confédération reconnaissait la République populaire de Chine. La Suisse était l'un des premiers pays occidentaux à le faire, comme le rappellent régulièrement les deux Etats.
Depuis ce télégramme, Berne et Pékin ont noué des liens, diplomatiques et surtout commerciaux, culminant avec l'accord de libre-échange signé en juin 2013. Mais l'amitié sino-suisse a aussi essuyé plusieurs crises, dont trois majeures au cours des 20 dernières années. Retour sur ces clashs.
1999: LA FUREUR DU PRÉSIDENT CHINOIS À BERNE
Le 14 mars 1999, le président chinois Jiang Zemin est sifflé par des manifestants pro-tibétains à son arrivée au Palais fédéral. Furieux, il refuse de participer à la cérémonie des honneurs militaires et ne salue pas les membres du Conseil fédéral qui l'attendent in corpore.
Dans son discours, il critique vertement les autorités suisses: "Est-ce que vous n'avez pas la capacité de gérer ce pays? (...) Aujourd'hui, vous avez perdu un ami".
Malgré l'interdiction de manifester, les Tibétains de Suisse se sont réunis devant le Palais fédéral pour huer le président chinois et demander le dialogue.
Un groupe, qui a préparé son coup d'éclat en secret, réussit à hisser des banderoles depuis le toit d'un bâtiment en face du Palais fédéral.
2005: PASCAL COUCHEPIN RENCONTRE LE DALAÏ-LAMA
Le 4 août 2005, Pascal Couchepin salue, au nom du Conseil fédéral, la venue du chef spirituel des Tibétains à l'EPFZ et s'entretient avec lui.
Pour ménager Pékin, le gouvernement suisse décide de rencontrer le dalaï-lama uniquement en sa qualité de chef spirituel de la communauté bouddhiste tibétaine. La manoeuvre ne suffit toutefois pas à ne pas irriter le gouvernement chinois, qui multiplie les menaces en cas de rencontre officielle.
"Le dalaï-lama n'est pas un personnage purement religieux", affirme alors à swissinfo un porte-parole de l'ambassade de Chine en Suisse. "C'est un exilé politique engagé de longue date dans des activités sécessionnistes qui minent l'unité nationale sous le couvert de la religion."
C'est la dernière fois que le chef spirituel des Tibétains a été reçu par un conseiller fédéral. En 2009, le gouvernement suisse hésite puis renonce à le rencontrer lors de sa venue en Suisse, créant une polémique. Le dalaï-lama est finalement reçu à Lausanne par la présidente du Conseil national Chiara Simoneschi-Cortesi.
Nouveau refus en 2010. La ministre des Affaires étrangères Micheline Calmy-Rey invoque alors "des raisons d'agenda". La communauté tibétaine en Suisse critique l'attitude du Conseil fédéral qui "ne peut s'expliquer que par les pressions exercées par Pékin".
2010: LE JURA ACCUEILLE DEUX OUÏGHOURS DE GUANTANAMO
Le 4 février 2010, après des semaines de tergiversations, le Conseil fédéral donne son aval à l'accueil de deux ex-détenus ouïghours de Guantanamo à titre humanitaire par le canton du Jura. Résultat: nouvelle crise avec Pékin, qui accuse les deux frères de terrorisme.
"Résolument opposée" à cette décision, l'ambassade de Chine à Berne explique qu'elle "ne correspond pas aux intérêts fondamentaux des deux pays". Peu avant, Pékin avait écrit à la ministre de la Justice de l'époque Eveline Widmer-Schlumpf pour l'avertir que, si la Suisse accueillait les deux frères, les relations sino-suisses seraient mises à mal.
Valentin Tombez
Les Tibétains pourront manifester dimanche
Les Tibétains en exil pourront manifester dimanche, le jour de la visite d'Etat du président chinois à Berne. Leur action se déroulera avant l'arrivée de Xi Jinping, à une centaine de mètres du Palais fédéral.
De dimanche matin à lundi après-midi, les accès à la Place fédérale, au Palais fédéral et à quelques ruelles des alentours seront bloqués. La patinoire sur la Place fédérale sera fermée. Berne fait tout pour que la visite se déroule sans incident.