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La collecte des empreintes vocales par Swisscom inquiète

Avec Swisscom TV c'est la TV qui vous regarde
Avec Swisscom TV c'est la TV qui vous regarde / 19h30 / 2 min. / le 9 février 2017
Lancé en août dernier, le système Voiceprint de Swisscom, qui identifie les clients avec leur voix, soulève des questions sur la protection des données. L'opérateur a effacé les empreintes vocales enregistrées jusqu'en novembre.

"Cet entretien est enregistré au titre de la formation et de la reconnaissance. Swisscom établit une empreinte vocale à partir de cet enregistrement." Voici le nouveau message d'accueil de la hotline de Swisscom.

Il a été changé le 17 novembre dernier "pour communiquer de manière transparente avec nos clients", indique Swisscom. Le message introduit début août lors du lancement de Voiceprint - "La conversation peut être enregistrée à des fins de sécurité" - n'a visiblement pas été jugé assez clair. Conséquence: l'opérateur a supprimé toutes les empreintes vocales établies entre août et la mi-novembre.

L'introduction de Voiceprint doit éviter lors d'appels de poser les traditionnelles questions pour vérifier l'identité du client, en l'identifiant automatiquement avec sa voix. Le but avancé par Swisscom, qui refuse de communiquer le nombre d'empreintes établies, est de lutter contre le risque de fraude et de diminuer la durée des appels à sa hotline. Et, ainsi, réduire les coûts. Au prix de la protection des données des clients?

Berne examine le système

Interrogés fin août, les services du Préposé fédéral à la protection des données (PFPDT) déclaraient que "l'information (des clients) nous semble adéquate". Six mois plus tard, ces mêmes services confirment toutefois avoir lancé un examen de la mise en oeuvre de Voiceprint par Swisscom, comme l'annonçait la semaine passée sur son blog l'avocat Nicolas Capt. Les systèmes biométriques "impliquent des risques considérables" du point de vue de la protection des données, d'après le PFPDT.

"Nous avons reçu passablement de plaintes de clients de Swisscom offusqués par ce système", indique Jean-Philippe Walter, préposé suppléant à la protection des données. "A mon sens, il faudrait avoir le consentement du client avant d'utiliser un tel système", poursuit-il, insistant sur le besoin d'information transparente aux clients. Le préposé prendra officiellement position après avoir terminé ses examens.

La police peut-elle accéder à la base de données?

La base de données créée par l'opérateur soulève plusieurs questions. Swisscom peut-il commercialiser ces données biométriques, comme il le fait avec les habitudes télévisuelles de ses clients (lire ci-dessous)? La vente des données nécessiterait au moins le consentement des personnes concernées. Dans le cas des habitudes télévisuelles, Swisscom s'est accordé le consentement de ses clients dans les réglages par défaut.

Autre question: la police et le Ministère public peuvent-ils accéder à ces données dans le cadre de leurs enquêtes? Oui, pour autant que les conditions du Code de procédure pénal soient remplies. Swisscom indique n'avoir "pour l'heure reçu aucune demande de ce type".

Selon plusieurs avocats contactés, la police peut saisir l'empreinte vocale d'une personne comme n'importe quelle autre donnée, numérique ou matérielle. Elle ne devrait toutefois pas avoir accès à la base de données en entier, bien que le sujet reste flou puisque la justice n'y a pas encore été confrontée.

Sur des serveurs suisses

Philippe Meier, avocat et professeur de droit à l’Université de Lausanne, rappelle aussi que "les obligations de sécurité sont fondamentales" vu la sensibilité des données. D'une part, contre les accès indus, mais aussi pour empêcher des usurpations d'identité.

Face aux doutes, Swisscom assure que "l'empreinte vocale ne peut être utilisée qu'à des fins de vérification d'identité" et qu'elle est enregistrée sur ses propres serveurs en Suisse. Reste donc au client de choisir s'il fait suffisamment confiance à Swisscom pour y confier son empreinte vocale ou s'il préfère répondre aux traditionnelles questions d'identification.

>> Plus de développement dans le 19h30

Valentin Tombez

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Comment refuser que son empreinte vocale soit enregistrée

Si vous restez en ligne après le message d'accueil de la hotline, qui prévient la création d'une empreinte vocale, vous donnez votre accord pour l'enregistrement de la conversation, selon les conditions de Swisscom.

Pour refuser, vous devez donc raccrocher. Ensuite, connectez-vous à votre "espace client", cliquez dans le menu sur "Mes données", puis "Utilisation des données", puis "Utilisation des données pour Swisscom" et, enfin, "Empreinte vocale". Là, une fois l'option "Empreinte vocale" désactivée, vous pouvez rappeler la hotline sans qu'elle n'établisse votre empreinte.

"A l'avenir, nous espérons changer de paradigme", explique Jean-Philippe Walter, préposé suppléant à la protection des données. C'est-à-dire que les paramètres par défaut soient le refus et que l'utilisateur puisse volontairement choisir s'il souhaite fournir ses données.

Habitudes télévisuelles enregistrées

Depuis le 1er février, Swisscom enregistre le comportement des utilisateurs de son service de télévision, sans les avoir prévenus au préalable, a révélé Le Temps mardi.

Les données sont mises à la disposition d'Admeira, la régie publicitaire créée par Swisscom, la SSR et Ringier pour une publicité ciblée dans les médias numériques.

Selon l'opérateur, la situation est légale.