La RIE III vaudoise maintenue intégralement?
Vaud, seul canton romand à avoir accepté - par 51,3% des voix - la réforme fédérale dimanche, devrait pouvoir conserver en l'état la RIE III cantonale plébiscitée par 87% des Vaudois en mars 2016.
Les prestations sociales arrimées à la baisse du taux d'imposition ne sont ainsi pas menacées, selon le ministre des Finances Pascal Broulis. Si elle n'est pas bloquée, la réforme vaudoise pourrait toutefois être "freinée", précise le conseiller d'Etat - le projet vaudois avait d'ailleurs prévu de pouvoir repousser d'une année la mise en oeuvre cantonale.
Le gouvernement vaudois devra rendre un rapport au Grand Conseil dans un délai de six mois, afin de définir la stratégie pour la suite.
Genève devra revoir sa copie
Pour le Conseil d'Etat genevois, le non à 52,3% à la RIE III est dû à la multiplication des niches fiscales prévues par le volet fédéral. Selon lui, ce refus n'est toutefois pas à transposer sur le projet cantonal, qui ne comporte pas les mêmes possibilités de déductions fiscales que celles qui ont suscité la controverse pendant la campagne.
Tel n'est toutefois pas l'avis de la gauche, qui entend bien pour renégocier le projet cantonal. Le taux de 13,49% voulu par le gouvernement est d'ores et déjà remis en question.
Le gouvernement genevois fera le point avec les partis le 23 février. Il décidera ensuite du sort de son projet d'application cantonale, actuellement examiné par le Grand Conseil.
Le Valais abandonne son avant-projet
Le Conseil d'Etat valaisan a de son côté annoncé dimanche déjà, après le résultat du vote, qu'il abandonnait la consultation en cours sur son avant-projet cantonal.
La mise en consultation, commencée en décembre, courait jusqu'au 28 février. Le Conseil d'Etat valaisan proposait d’abaisser de 21,56% à 15,61% le taux d’impôt des personnes morales réalisant un bénéfice supérieur à 150'000 francs et de maintenir à 12,66% le taux de celles qui réalisent un bénéfice inférieur.
L'exécutif cantonal entend participer activement aux prochaines négociations, et voir aboutir un projet, tant au niveau fédéral que cantonal.
Projet fribourgeois appelé à "peu évoluer"
Fribourg, où la RIE III fédérale a été rejetée à 63,23%, ne devrait pas dévier de son cap. Dans son avant-projet cantonal - plus "modéré" que la proposition fédérale, selon le directeur des Finances Georges Godel - le taux d'imposition est fixé à 13,72%. Des mesures de compensation sont prévues pour les communes et les paroisses.
A la différence du projet fédéral, la mouture fribourgeoise ne retient pas les intérêts notionnels, mesure controversée, et limite les effets des autres outils de déductions fiscales.
Au lendemain du non à la RIE II fédérale, Georges Godel se dit "assez confiant" pour le projet cantonal, qui ne devrait pas beaucoup évoluer.
Aucun projet sur la table à Neuchâtel
Seul canton à n'avoir pas dévoilé comment il appliquerait la réforme de la fiscalité des entreprises, Neuchâtel avait déjà abaissé progressivement son taux d'imposition des bénéfices à 15,6%, une mesure de 2011 visant à réduire les allégements fiscaux.
Les statuts fiscaux spéciaux, eux, sont pourtant en augmentation dans le canton. Neuchâtel, qui a dit non à RIE III à 56,22% dimanche, devra prendre des mesures pour les éliminer, afin de suivre l'alignement de la Suisse sur les exigences européennes.
Le Jura en attente de la voix de Berne
Dans le canton du Jura, la RIE III a été rejetée à 66,9%. Le gouvernement jurassien avait présenté fin janvier sa version de la mise en œuvre de la réforme. Avec un taux d'imposition entre 15 et 17%, il se situe dans la moyenne cantonale.
Le Jura applique actuellement un taux de 20,5%. Les nouvelles propositions fédérales devraient aiguiller le Conseil d'Etat sur la suite à donner à sa stratégie de mise en oeuvre.
Le ministre des Finances Charles Juillard estimait avant le scrutin qu'en cas de non à la RIE III, le risque était grand que la région perde en attractivité et subisse des délocalisations.
Projet bernois très proche de la RIE III fédérale
Dans le projet du canton de Berne, qui a refusé la RIE III à 68,4% le 12 février, l'impôt sur le bénéfice des entreprises doit être ramené de 21,6% actuellement à 16,37%. La stratégie fiscale bernoise se calque sur le projet fédéral.
Berne se trouve actuellement dans le peloton de queue des cantons qui imposent le plus lourdement le bénéfice des sociétés.
Les cantons "prêts à discuter"
Tous les cantons attendent de la Berne fédérale qu'elle s'attaque rapidement à la nouvelle version de la réforme fiscale. "Nous sommes prêts à discuter", afin de trouver une solution acceptable, a souligné dimanche le Jurassien Charles Juillard.
Le président de la Conférence des directeurs cantonaux des finances conseille ainsi à la Confédération de demander aux partenaires de l'Union européenne (UE) et de l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) un "délai de grâce d'un an ou deux", vu la difficulté de revoir la copie dans un délai aussi rapproché que 2019.
>> Lire la réaction de l'UE et de l'OCDE : La Commission européenne "déçue" du vote suisse contre la RIE III
Katharina Kubicek