Impossible d'y échapper. Depuis des mois, les spots publicitaires tournent en boucle pour vanter les mérites des casinos en ligne. Pour attirer un maximum de nouveaux joueurs, ces sites n’hésitent pas à se payer les services des plus grandes stars du football.
Un marketing bien rôdé pour Niels Weber, psychologue spécialiste des addictions à l’association Rien ne va plus, interrogé dimanche dans le 19h30 de la RTS: "Ces publicités visent principalement les jeunes hommes de 20 ou 30 ans. Les joueurs de foot sont synonymes de personnes qui ont réussi, donc clairement ces publicités visent ceux qui espèrent pouvoir vivre le même train de vie que ces stars."
Des sites illégaux
Ces publicités sont trompeuses. Pour le moment, proposer des jeux d’argent en ligne est totalement illégal en Suisse. La nouvelle loi sur les jeux d'argent - discutée actuellement à Berne - devrait mettre fin à cette interdiction en autorisant les jeux en ligne uniquement pour les casinos suisses qui disposent déjà d’une concession.
Sur internet, ça va très vite et c'est illimité
Actuellement, les géants de ces casinos voient leurs sites facilement accessibles par les Suisses. Pareil pour la publicité, ces e-casinos ont trouvé l'astuce: ne faire la promotion que de sites gratuits, sans dépôt d’argent possible et dont l’adresse se termine généralement par un ".net". Lorsque les joueurs se connectent, ils sont vite redirigés vers le site payant.
Risques d'addiction accrus
Une fois inscrits, les joueurs peuvent perdre gros car ces casinos sont accessibles partout et en tout temps. Ils sont sans limite de jeu. Alex, un amateur de poker en ligne, témoigne au micro de la RTS: "Sur internet, on peut jouer sur plusieurs tables et les cartes sont distribuées immédiatement, alors que dans un casino, on ne peut jouer que sur une table et c'est lent, les gens réfléchissent."
Les associations de prévention voient là un grand danger et, pour éviter une pratique excessive, suggèrent de faire des pauses entre les parties.
Ce qu'on considère comme dangereux c'est qu'on y a accès tout le temps
Autre point important: le manque à gagner pour la Confédération. La majorité des e-casinos ont des serveurs basés dans des paradis fiscaux européens comme Gibraltar, Malte et l’île de Man. Ces sites illégaux ne payent donc pas un centime d’impôt à la Suisse à la différence des casinos traditionnels et des loteries, dont les gains sont reversés à l’AVS et aux associations culturelles et sportives comme le fixe la Constitution.
Un blocage demandé
Pour le directeur de la commission fédérale des Maisons de jeux, Jean-Marie Jordan, il est donc urgent de mettre en place des mesures de blocage contre ces sites: "Si vous mettez en place une offre légale, que ce soit à travers les loteries ou les casinos, ces opérateurs devront payer des impôts et devront aussi mettre en place des mesures de protection sociale, alors que les opérateurs illégaux qui viendraient travailler en Suisse n'auraient aucune contrainte."
Aujourd'hui nous avons peu de moyens puisque les offres qui viennent de l'étranger sont des offres légales
Une semaine après notre inscription en ligne, nous avons reçu huit e-mails, deux SMS et trois appels de relance. De quoi alimenter un business en pleine croissance. Selon la Fédération suisse des casinos, près de 300'000 millions de francs seraient joués chaque année depuis la Suisse sur ces casinos illégaux.
Cécile Tran-Tien/Dimitri Zufferey/boi
Ce qui va changer avec la nouvelle loi
Le projet de loi actuellement en discussion au Parlement prévoit d’abroger l’interdiction des jeux en ligne qui datait de 1998. Le blackjack, la roulette et les autres jeux d’argent pourront donc être proposés en Suisse mais uniquement par les casinos terrestres qui disposent déjà d’une concession.
Autre changement, les gains des loteries et des paris sportifs seront exonérés d’impôt au même titre que les gains réalisés dans les maisons de jeu.
Que risquent les joueurs en Suisse?
On estime qu'environ 10% des adultes résidant en Suisse jouent à des jeux d’argent sur internet, selon le message concernant la loi fédérale sur les jeux d’argent.
Avec la nouvelle loi, les joueurs ne risquent rien, si ce n’est de se voir confisquer leurs gains. Seuls les organisateurs de jeux et les fournisseurs d’accès seront pénalement punissables en Suisse. En Belgique, les amendes peuvent aller jusqu'à 25'000 euros pour les joueurs qui misent sur des sites illégaux.