Sur le plateau d'Infrarouge mercredi soir, l'auteur du blog Les hommes libres et du livre "Feminista : ras-le-bol!" a accusé les féministes d'avoir "pris sous leur aile toutes ces questions (de sexisme et de discrimination) comme si elles étaient les seules à en être victimes, les seules à être victimes de violence". "Ce n'est pas la réalité", a-t-il dénoncé.
Dans une virulente passe d'armes avec la chercheuse Caroline Dayer, l'anti-féministe a ajouté que "des études faites au Canada" démontrent que "les hommes sont autant victimes de discriminations, de violences physiques et conjugales" que les femmes.
Pour Caroline Dayer, "ces chiffres ne tiennent pas la route". De fait, les données sur la violence fournies par Statistique Canada (la source citée par John Goetelen) ou, en Suisse, par l'Office fédéral de la statistique (OFS), ne vont pas exactement dans le sens des propos de l'essayiste.
Les hommes autant victimes de violences conjugales? C'est faux
Que ce soit au Canada ou en Suisse, les femmes sont largement surreprésentées parmi les victimes de violences familiales et conjugales. Statistique Canada indique que 68% des victimes de violence familiale déclarée par la police en 2013 étaient de sexe féminin et précise que, en la matière, les conjoints ou ex-conjoints sont les principaux auteurs d'actes de violence envers les femmes.
En Suisse en 2016, plus de 7300 des victimes de violences domestiques étaient des femmes, tandis que 2700 étaient des hommes, selon l'OFS.
Les violences sexuelles touchent davantage les femmes
Pour ce qui est des faits de violence au sens large, il y a bien eu l'an passé en Suisse davantage de victimes masculines de crimes et d'agressions violentes que de victimes féminines (environ 40'800 hommes contre 36'500 femmes, si l'on compte les infractions détaillées dans le graphique ci-dessus).
L'OFS note que si les femmes sont plus exposées à la violence au sein de leur foyer, les hommes, eux, sont plus souvent victimes de violence dans l'espace public.
Mais l'organisme statistique relève aussi que "la violence touche les femmes et les hommes de manière différente". Ainsi, si les hommes sont plus représentés parmi les victimes d'atteintes à la vie et à l'intégrité corporelle (11'970 hommes victimes de ce type de violences en 2016 contre 9350 femmes), les femmes sont beaucoup plus susceptibles d'être victimes d'atteintes à leur liberté (menaces, contraintes, séquestrations) et à leur intégrité sexuelle (3540 victimes étaient des femmes en 2016 contre 740 hommes).
Chez les Canadiens, la situation est semble-t-il comparable. Statistique Canada indique: "pour certaines infractions, le taux de violence (...) est beaucoup plus élevé chez les femmes que chez les hommes." Ainsi, les Canadiennes sont-elles beaucoup plus susceptibles d'être victimes d'agressions sexuelles ou d'être harcelées, tandis que les meurtres ou les tentatives de meurtre y concernent davantage les hommes.
Les majorité des agresseurs sont des hommes
John Goetelen omet un paramètre de taille dans sa démonstration: s'il n'est pas question de nier le fait que les femmes puissent être violentes, y compris envers des hommes, les chiffres montrent que les hommes sont nettement plus représentés parmi les auteurs de violences.
Toujours l'an dernier en Suisse, sur 217 homicides ou tentatives d'homicides, 187 ont été perpétrés par des hommes. En ce qui concerne les affaires de violence domestique, 7300 prévenus étaient des hommes contre moins de 2300 femmes.
Et là encore, les données canadiennes vont dans le même sens. Selon l'institut de statistiques cité par John Goetelen, la majorité des agresseurs sont de sexe masculin: à 82% dans les situations de voies de fait, à 86% dans les cas d'incidents violents et même à plus de 90% dans les cas d'agressions sexuelles.
Pauline Turuban