Avec la mise en consultation des détails du mécanisme de préférence indigène décidé en décembre 2016 au Parlement, le Conseil fédéral a lancé mercredi l'ultime bataille sur la mise en oeuvre du vote du 9 février 2014. Il s'agit de l'obligation faite aux employeurs de soumettre en primeur aux offices régionaux de placement (ORP) les offres d'emplois pour des métiers où le taux de chômage dépasse les 5%. La mesure concernerait 187'000 places vacantes si on se réfère aux données de 2016.
>> Lire : Les détails de l'application de la préférence indigène désormais connus
Mais cette mise en pratique de la limitation de l'immigration fait grincer des dents dans les milieux économiques. Et certains représentants patronaux montent déjà aux barricades, contestant notamment le seuil de 5%.
"Un surcoût administratif inutile"
L'Union patronale suisse, notamment, aurait préféré un taux de 6%, qui concernerait moins de cas. "Avec un taux à 5% qui concerne 187'000 demandeurs d'emploi, il faudra renforcer grandement les effectifs des ORP", estime Marco Taddei, membre de la direction de l'Union patronale suisse. "Il y a donc un surcoût administratif tout à fait inutile."
Un autre point critiqué est la durée de la préférence indigène: cinq jours pendant lesquels les employeurs seront contraints d'engager des chômeurs. "Prenons le secteur de l'hôtellerie et de la gastronomie, où il y a des flux saisonniers: il faut absolument avoir un collaborateur le lendemain matin. Une semaine, c'est beaucoup trop", souligne Marco Taddei.
"Un moindre mal"
Mais tous ne sont pas de cet avis dans les milieux patronaux. "C'est évidemment une contrainte supplémentaire", note le directeur du Centre patronal vaudois Christophe Reymond. "Mais je crois que cela doit s'analyser comme un moindre mal. Le Conseil fédéral a promis que le système ne serait pas bureaucratique et dans le processus d'emploi, il est certain qu'un délai de cinq jours est quelque chose de supportable."
C'est aussi l'avis du premier secrétaire de l'Union syndicale suisse Daniel Lampart. "Il y a aujourd'hui déjà 80'000 entreprises qui annoncent les postes vacants aux ORP et qui sont contentes", explique-t-il. "Si on dit aux autres qu'elles sont aussi obligées, elles vont faire de bonnes expériences et vont engager aussi des chômeurs." Le double critère des 5% et des cinq jours est considéré comme un minimum par les syndicats, qui espèrent que le Conseil fédéral ne lâchera pas face aux pressions d'une partie des milieux patronaux.
Pietro Bugnon/oang