Après le Conseil des Etats, le Conseil national a entamé un débat, jeudi à Berne, sur l'initiative No Billag. Ce texte, qui vise à supprimer la redevance radio-TV, principale source financière de la SSR, est soutenu par une partie de la droite.
Après plusieurs heures d'interventions, la discussion a été suspendue. Elle reprendra le 25 septembre prochain. Près de 70 orateurs avaient annoncé vouloir prendre la parole.
"Un débat sur le futur des médias"
Pour Gregor Rutz (UDC/ZH), il s'agit "d'un débat sur le futur des médias, qui doivent être indépendants en termes d'opinion, mais aussi financièrement."
La SSR n'est pas là pour diffuser des séries américaines alors que des télévisions privées peuvent le faire. Elle doit se concentrer sur le service public stricto sensu, a-t-il aussi ajouté. Le Bernois Adrian Amstutz a quant à lui dénoncé un monopole d'Etat qui uniformise l'offre et empêche la concurrence privée de respirer.
Un abandon aux conséquences catastrophiques
Les conséquences financières d'un abandon de la redevance ou de son plafonnement à 200 francs, une option défendue par l'UDC en cas de rejet de l'initiative "No Billag", seraient catastrophiques. La SSR devrait fermer de nombreuses antennes au détriment des régions périphériques, a insisté Martin Candinas (PDC/GR). Elle ne pourra pas compenser ses pertes avec la publicité. Les radios et télévisions locales seraient aussi frappées. Pis, le paysage audiovisuel suisse serait à la merci des médias étrangers.
La gauche, le PDC mais aussi plusieurs élus de droite, notamment romands, refusent de se lancer dans une telle opération de démantèlement de la SSR et du service public. La diversité culturelle et linguistique est en jeu, a affirmé Viola Amherd (PDC/VS).
Les privés ne pourront pas pallier les manques d'offre. Des bouquets payants seraient beaucoup trop chers pour les téléspectateurs, a poursuivi Edith Graf (PS/TG).
Pareil pour le PLR. "Supprimer la redevance ou la diminuer revient à rendre les programmes encore plus mauvais qu'aujourd'hui", a souligné Frédéric Borloz (PLR/VD), qui voit dans la SSR "un ciment de la cohésion nationale".
Du côté des Verts, on souhaiterait limiter la publicité sur les ondes de la SSR. Les Vert'libéraux auraient quant à eux aimé, à titre de "compromis typiquement helvétique", plafonner à 1,1 milliard la quote-part de redevance destinée au diffuseur national de service public.
Bientôt une votation populaire
L'issue de la votation populaire, qui pourrait intervenir dès le printemps, soulève de nombreuses craintes chez les partisans de la SSR. Le oui de justesse à la réforme de la redevance en juin 2015 a montré une certaine grogne au sein de la population.
Le gouvernement va présenter une nouvelle mouture de la concession de la SSR d'ici la fin de l'année. Et il devrait mettre une nouvelle loi sur les médias électroniques en consultation au printemps 2018.
ats/ctr
Service public ou libre concurrence?
La redevance s'élève actuellement à de 451,10 francs par ménage. Avec sa généralisation d'ici 2019, la facture devrait baisser à moins de 400 francs alors que les entreprises, dont le chiffre d'affaires dépasse 500'000 francs par an, débourseront entre 400 et 39'000 francs.
En 2015, la redevance a rapporté 1,35 milliard de francs (hors TVA). Sur ce total, la part de la SSR est de 1,235 milliard, soit l'essentiel de son budget de quelque 1,6 milliard. Le reste est essentiellement allé à 34 radios et télévisions locales et régionales.
L'initiative "Oui à la suppression des redevances radio et télévision (suppression des redevances Billag)" priverait totalement le service public de cette manne. A défaut, la droite propose une autre piste: limiter la redevance à 200 francs par ménage et en exempter les entreprises. Ce contre-projet serait soumis au peuple comme alternative à l'initiative, ou seul si cette dernière est retirée.
Cette option a pour l'instant été balayée en commission préparatoire. La gauche, le PDC mais aussi plusieurs élus de droite, notamment romands, refusent de se lancer dans une opération de démantèlement de la SSR et du service public. La libre concurrence entre médias prônée par les initiants ne les convainc pas.