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Le burn-out, ce mal qui gagne les médecins en formation de Suisse

Le burn out des médecins en formation
Le burn out des médecins en formation / Mise au point / 13 min. / le 15 octobre 2017
Dans les hôpitaux suisses, les médecins-assistants enchaînent des journées sans fin. Un praticien sur trois se dit "harassé", selon une récente enquête. Les heures supplémentaires sont légion malgré la loi en vigueur.

"C'est une semaine calme. Calme avec un horaire à 50 heures", confie Christelle, médecin au sein du service de pédiatrie de l'Hôpital neuchâtelois, dans Mise au Point dimanche.

Après six années d'études, la jeune femme se spécialise désormais pour obtenir son diplôme FMH. En une journée, visites, auscultations et tâches administratives se succèdent à un rythme effréné. Une formation exigeante qui épuise plusieurs de ses collègues.

En juin dernier, l'Association suisse des médecins-assistants et chefs de clinique (ASMAC) a tiré la sonnette d'alarme. Un médecin en formation sur deux se dit souvent fatigué et plus d'un sur trois indique parfois atteindre ses limites, selon une enquête réalisée sur mandat de l'ASMAC. Près d'un médecin sondé sur deux rapporte même des situations où les collègues épuisés mettent en danger des patients.

50 heures par semaine, une limite théorique

Dans les établissements suisses, les médecins-assistants sont soumis à la loi sur le travail depuis 2005. Ils ne peuvent exercer que 50 heures par semaine. Mais pour beaucoup, cette durée maximale du temps de travail n'est que théorie.

"Très souvent, voire même systématiquement, nous faisons des heures supplémentaires", témoigne M., jeune médecin qui a souhaité rester anonyme, craignant la réaction de ses supérieurs. "A l'époque où j'ai terminé ma formation de médecin-assistant, je pense que j'avais accumulé entre 150 et 200 heures supplémentaires sur un peu plus d'une année."

Selon l'enquête de l'ASMAC, 52% des jeunes médecins travaillent plus longtemps que ce que la loi autorise. Pour un poste à plein temps, cela correspond en moyenne à 56 heures par semaine.

"Cela nous arrivait de noter une fausse heure"

"Les heures supplémentaires doivent être l'exception et pas la règle", souligne Antonio Racciatti, directeur des ressources humaines au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). "Nous allons vraiment insister pour que cela devienne une réalité absolue dans toute l'institution."

Pourquoi de tels débordements dans le temps de travail, alors que la législation est en vigueur depuis déjà douze ans? D'après plusieurs médecins en formation qui se sont confiés à la RTS, la pression pour éviter les heures supplémentaires est telle qu'ils sont parfois amenés à mentir sur les horaires effectués.

"Cela nous arrivait de noter une fausse heure ou de 'badger', puis de retourner au bureau pour terminer notre travail", raconte M. "Tout cela pour ne pas être vu comme un mauvais élément."

Une motion déposée cet été

Face à cette situation, le conseiller national Angelo Barrile (PS/ZH), vice-président de l'ASMAC, a déposé une motion lors de la session parlementaire d'été.

Le texte demande au gouvernement d'enquêter sur la manière dont les dispositions légales existantes sont appliquées dans le domaine de la santé. Et en appelle à un moratoire sur la "flexibilisation" de la loi sur le travail afin d'éviter "un retour au XIXe siècle".

En août dernier, le Conseil fédéral a proposé de rejeter la motion, soulignant les améliorations obtenues grâce aux "actions ciblées" des cantons et au soutien du Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO).

>> Reportage et témoignages dans Mise au Point dimanche soir sur RTS Un

Reportage de Micaela Mumenthaler

Adaptation web de Tamara Muncanovic

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