Modifié

Les Suisses jugent alarmante une hausse de 3 degrés d'ici à la fin du siècle

Les Suisses, en particulier les plus jeunes, prennent le réchauffement climatique très au sérieux, selon une étude. La majorité d'entre eux se disent prêts à des actions individuelles, mais ne font guère confiance aux politiciens.

Une large majorité des Suisses (85%) considèrent le changement climatique comme une réalité avérée, même si ceux qui en sont le plus convaincus sont les "millenials" âgés de 15 à 29 ans (92%) et les Romands (90%).

Selon cette étude commandée par la SSR et publiée mercredi à l'occasion de la soirée thématique "la Suisse +3°" (voir encadré), la population, toutes catégories d'âge et régions linguistiques confondues, dit percevoir les répercussions du changement climatique.

Plus de la moitié (51%) estiment que quelques conséquences seulement se font déjà sentir, et presque tous les autres (47%) trouvent même que les impacts sont nettement perceptibles. Ceux qui pensent qu’aucune répercussion n'est perceptible ne sont qu'une infime minorité.

Plus des deux tiers des répondants (68%) jugent la perspective d'une hausse de 3 degrés Celsius de la température moyenne en Suisse d'ici la fin du siècle "alarmante", voire "très alarmante". Les 15-29 ans (75%) et les Tessinois (73%) sont les plus préoccupés.

Les craintes de la population sont essentiellement locales et se focalisent notamment sur des sujets forts tels que la fonte des glaciers ou les glissements de terrain dans les zones montagneuses.

Le phénomène est perçu comme une menace plus importante que l’effondrement de la prévoyance vieillesse ou le terrorisme.

Différences de perception selon l'âge et l'orientation politique

L'enquête note une corrélation entre l'orientation politique des sondés et leur propension à considérer le réchauffement comme une menace grave. Selon l'étude, les personnes politiquement orientées à droite sont celles qui redoutent le moins le réchauffement climatique; elles tendent aussi à considérer l'effondrement de la prévoyance vieillesse comme une menace plus importante.

Une différence de perception est aussi significative en fonction de l'âge des répondants. Les 15-29 ans sont par exemple convaincus à 80% que l'homme est le principal responsable du réchauffement climatique, contre 67% des 45-59 ans et 66% des 60-79 ans. De même, si 80% des 15-29 ans considèrent le réchauffement climatique comme un phénomène rapide, c'est le cas de 69% des 60-79 ans.

Sept personnes sur 10 sont d’avis que le changement climatique leur présente personnellement plus d’inconvénients que d’avantages. Toutefois, la proportion de personnes qui juge le changement climatique négatif est nettement inférieure en Suisse alémanique que dans les régions latines.

Faible confiance dans la politique nationale

En ce qui concerne les solutions, les Suisses estiment qu’il est urgent de réagir avant tout à l’échelon international (à 92%), ensuite au niveau des actions individuelles (à 89%) et seulement après, au niveau national (à 85%).

Les partis politiques helvétiques se voient attribuer de maigres compétences en matière de changement climatique: moins de 20% des personnes interrogées les trouvent compétents pour trouver des solutions pertinentes de lutte contre le réchauffement.

Dans ce contexte, les Verts, suivis par les Vert'libéraux, sont considérés comme les plus aptes, tandis que l'UDC et la Lega tessinoise sont considérées comme les moins capables d'apporter des réponses efficaces.

L’orientation politique des sondés joue un rôle déterminant dans leur appréciation des mesures de lutte prises au niveau fédéral, comme le subventionnement des énergies renouvelables ou la taxation des combustibles fossiles.

Les Romands accros à leur voiture?

Au niveau national, la première action individuelle citée est le renoncement à la voiture, au profit des transports publics ou du vélo. Mais de fortes variations existent entre les régions linguistiques. Dans le détail, c'est surtout en Suisse alémanique que l'on privilégie le transport collectif.

Les Romands, quant à eux, ne citent cette mesure qu'en quatrième position: 17% d'entre eux renoncent au véhicule individuel, contre 29% des Alémaniques et 27% des Tessinois. En outre, les francophones sont 15% à juger cette initiative efficace, contre 23% des Alémaniques et 20% des Tessinois.

A l'inverse, le tri des déchets est cité nettement plus souvent dans les régions latines qu’en Suisse alémanique.

L'étude montre encore qu'une part conséquente de la population helvétique serait disposée à renoncer à certains éléments de sa consommation et de son confort quotidiens.

Là encore, il est intéressant de se pencher sur les écarts intergénérationnels. Les moins de 30 ans se déclarent moins disposés à diminuer l’utilisation de climatiseurs/chauffages ou à moins prendre l’avion que leurs aînés; en revanche, les jeunes sont les plus disposés à renoncer à la voiture (49%).

D'autres variations existent selon les régions linguistiques. Comparativement aux Alémaniques et aux Tessinois, les Romands se disent davantage disposés à baisser le chauffage en hiver (78%) et à limiter leur consommation de viande (72%); ils sont en revanche moins enclins à payer plus cher pour des produits locaux/de saison (75%).

"Politique peu ambitieuse"

"Ce qui est étonnant, c'est que la majorité de la population considère le changement climatique comme une menace, et qu'on ait en Suisse une politique aussi peu ambitieuse", a réagi Océane Dayer, membre et fondatrice de Swiss Youth for Climate, interrogée sur ces résultats dans La Matinale de la RTS.

"Les mesures individuelles sont nécessaires, mais il est dangereux de se détourner de la mobilisation collective. Nous avons besoin de conditions cadres, et il est fondamental que l'économie et la politique jouent leur rôle", ajoute-t-elle.

>> Ecouter son interview intégrale :

Océane Dayer, présidente de Swiss Youth for Climate
Océane Dayer, vice-présidente et fondatrice de Swiss Youth for Climate / La Matinale / 6 min. / le 29 novembre 2017

Pauline Turuban

Publié Modifié

Conception de l'étude

A l'occasion de "la Suisse +3°", la soirée thématique sur le changement climatique diffusée mercredi, la SSR a recueilli les opinions, les craintes et les positions de la population helvétique sur ce sujet.

Du 8 au 26 septembre, plus de 2000 interviews ont été menées auprès de personnes âgées de 15 à 79 ans, qui utilisent internet à des fins privées au moins plusieurs fois par mois.

"Plus 3 degrés", une soirée thématique nationale sur le changement climatique

Selon les experts, si les engagements actuels de lutte contre le réchauffement climatique se poursuivent, la température augmentera de 3 degrés Celsius d'ici la fin du siècle. Quel impact une telle hausse aurait-elle sur nos vies, notre économie, notre environnement, notre santé? Quels dangers, mais aussi quelles opportunités pourrait-elle représenter?

Les quatre chaînes de la SSR ont exploré ce sujet majeur de société dans une grande soirée thématique mercredi soir. Durant trois heures, en direct, se sont succédé film de fiction, reportages, discussions et témoignages d’experts, afin de traiter cette problématique à travers ses nombreux prismes.