Alors que le nouveau conseiller fédéral en charge des Affaires étrangères Ignazio Cassis a demandé cent jours d'indulgence avant que son bilan ne soit jugé, Micheline Calmy-Rey n'avait pas hésité, trois semaines après son entrée en fonction le 1er janvier 2003, à exiger de rencontrer Colin Powell, chef de la diplomatie américaine à Davos. Elle se souvient du contexte de cette rencontre dans La Matinale.
"La guerre en Irak menaçait"
"Moi, je n'avais pas le choix, puisque Davos se tient à fin janvier, que je venais d'entrer en fonction et que la guerre d' Irak menaçait", raconte l'ancienne ministre. "La Suisse avait une position plutôt intéressante et plutôt minoritaire sur le continent européen et dans le monde. La Suisse était opposée à cette coalition internationale sans approbation du Conseil de sécurité des Nations Unies. L'occasion de rencontrer Colin Powell à Davos était une occasion en or."
Micheline Calmy-Rey se rappelle s'être rendue à Davos de manière "très préparée", avec une rencontre préalable avec l'ambassadeur américain et un grand travail du Département des affaires étrangères. "La leçon que j'ai apprise, c'est qu'il était possible de dire à un puissant de la Terre la position d'un pays comme le nôtre et que cette position était respectée et entendue, même si les Américains sont entrés avec leurs alliés en guerre en Irak", constate la socialiste.
"Les intérêts du pays doivent être défendus"
Lors de rendez-vous comme le Forum de Davos, "on rencontre beaucoup de monde avec lesquels on ne partage pas les mêmes opinions, les chefs d'Etat ne sont pas tous des diplomates enthousiastes", souligne-t-elle. "C'est là que les intérêts du pays doivent être défendus et qu'il faut aussi savoir parler vrai, c'est-à-dire qu'il faut pouvoir défendre ses positions sans être arrogant."
Et d'insister: "C'est important de dire les choses, c'est vraiment la leçon que j'ai apprise à Davos. (...) C'est important de défendre ses positions, je pense qu'il faut vraiment le faire. La complaisance n'a pas cours, chaque pays défend ses intérêts. La diplomatie, ce n'est pas une question d'amour, c'est une question d'intérêts, de politique différente."
Propos recueillis par Romain Clivaz
Adaptation web: Eric Butticaz
Jean-Claude Juncker, un "renard très malin"
Même si le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker sera présent à Davos, Micheline Calmy-Rey considère que les négociations entre la Suisse et l'Union européenne (UE) ne vont pas se débloquer dans les couloirs de la station grisonne: "L'objectif, c'est d'avoir un très bon accord, et ça ne peut pas être fait au détour d'une conversation à Davos."
Pour le président du parti socialiste suisse Christian Levrat, les négociations avec l'UE devraient être menées tant que Jean-Claude Juncker est encore en fonction, puisqu'il est considéré comme un ami de la Suisse. "Juncker, c'est un renard très très très malin", estime Micheline Calmy-Rey, en se souvenant des négociations sur la fiscalité de l'épargne. "On a cru à son amitié et à son amour de la Suisse, mais il s'est révélé qu'il a été plus malin que nous et qu'il a posé ses conditions."
"Jean-Claude Juncker est un renard très très très malin", estime l'ancienne conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey dans #LaMatinaleRTS. >> En lire plus: https://t.co/LaX4Oe4hvg pic.twitter.com/pmRz4nsMnN
— RTSinfo (@RTSinfo) 11 janvier 2018