"La donne a changé avec l'arrangement extrajudiciaire passé avec
les Etats-Unis", a souligné le président du Parti socialiste
suisse, Christian Levrat, devant les médias vendredi.
Avec cet accord, qui repose sur les dispositions légales en
vigueur aujourd'hui, "l'UBS admet pour la première fois avoir violé
le droit suisse", selon lui.
"Assentiment de la direction" soupçonné
L'affaire ne touche plus quelques
clients isolés comme en début d'année, mais porte visiblement sur
plusieurs milliers de cas. Dans ces conditions, le conseiller
national soupçonne une action délibérée de l'UBS. Il ne croit pas
que Marcel Ospel, alors numéro un de la banque, et Peter Kurer, à
l'époque chef juriste, n'étaient pas au courant: "Des structures
juridiques de ce type sont toujours montées avec l'assentiment de
la direction".
Personne ne peut croire une seconde que les cadres supérieurs de
l'UBS ne connaissaient pas l'existence de pratiques douteuses qui
avaient cours s'agissant du démarchage actif de clients américains
souhaitant échapper au fisc. Les socialistes soupçonnent donc la
banque d'avoir délibérément violé le droit suisse. Ils en veulent
pour preuve les fuites dans les médias selon lesquelles la Suisse
devrait livrer jusqu'à 5000 noms de clients à la justice
américaine. Cela a finalement mis en danger la place financière
suisse, terni la réputation du pays et de son économie et suscité
des "dommages sans précédent".
Le PS veut une condamnation pénale
Christian Levrat compte sur une condamnation. Une restitution
d'argent ne suffit pas à ses yeux. "Il s'agit d'une question de
justice et d'équité". Les petits patrons qui sont confrontés à une
faillite doivent répondre au niveau pénal, il n'y a pas de raison
qu'il en aille différemment quand la responsabilité des dirigeants
d'un géant bancaire est en jeu. Sans compter que donner
l'impression que les plus puissants échappent à la loi est "mortel
pour notre cohésion.
Le fait que les détails de l'accord avec Washington ne soient pas
encore connus, y compris pour le juge d'instruction chargé de
traiter la plainte, n'est pas un obstacle puisqu'ils devraient être
rendus publics dans quelques semaines, a fait valoir le
Fribourgeois. Il reviendra ensuite au parquet d'examiner s'il
convient d'étendre le champ d'investigation à d'autres délits.
Silence de l'UBS, Kurer serein
Personne ne peut
croire une seconde que la direction de l'UBS ignorait les pratiques
douteuses aux Etats-Unis
Parti
socialiste
Le PS a adressé une lettre, datée
de vendredi, au Ministère public III du canton de Zurich lui
demandant d'engager une procédure pénale. Les choses ne bougeant
pas en ce qui concerne le droit civil, le parti espère ainsi
"définitivement clarifier ce dossier sur le plan juridique".
Interrogée par l'ATS, l'UBS n'a pas voulu commenter le dépôt de
cette plainte. Peter Kurer accueille lui cette plainte avec
sérénité. Les reproches soulevés à son encontre par le PS ont déjà
été examinés par diverses instances en Suisse et à l'étranger, qui
ont conclu qu'ils étaient infondés et gratuits, précise l'ancien
président d'UBS dans un communiqué.
Facture à rembourser
Les socialistes critiquent par ailleurs "le culte du secret" du
Conseil fédéral, qui persiste à ne rien vouloir révéler de la
nature et de la portée des arrangements. Et de l'appeler à
poursuivre dans la voie des négociations pour conclure des
conventions de double imposition fondées sur les critères de l'OCDE
avec de grands partenaires comme l'Allemagne.
Le PS veut aussi faire la lumière sur les coûts financiers et
humains supportés par l'administration fédérale en raison des
démêlés de l'UBS aux Etats-Unis. La conseillère aux Etats Anita
Fetz (BS) a déposé une interpellation dans l'espoir d'obtenir la
facture des efforts fournis et des voyages effectués, y compris par
les conseillers fédéraux compétents. Le but est que l'UBS rembourse
cette somme (lire aussi encadré ci-contre).
Dans le domaine législatif, les socialistes prônent un
renforcement du devoir de diligence des banques et son ancrage dans
la loi. L'aide à la soustraction fiscale doit être sanctionnée en
Suisse comme à l'étranger.
ats/cer
E.Widmer-Schlumpf envisage de faire participer l'UBS
L'UBS échappera peut-être à une amende, mais la question des coûts engendrés par ces négociations se pose d'ores et déjà.
"Naturellement nous sommes prêts à payer les frais liés à la procédure de John Doe Summons si la Confédération nous en fait la demande", a indiqué Christoph Meier, porte-parole chez UBS, dans une brève déclaration.
Interrogée sur ce point dans l'émission "Forum" de la RSR, la cheffe du Département de justice et police Eveline Widmer-Schlumpf envisage une participation de l'UBS aux frais, mais précise que l'accord a été conclu entre les deux gouvernements et qu'il faut d'abord établir une base légale avant de déterminer la participation financière de l'UBS.
L'Etat a agi en l'occurrence dans le cadre de ses missions régaliennes et non pas en tant qu'avocat de l''UBS. La marche à suivre est donc encore à préciser, a ajouté la Grisonne à la Radio Suisse alémanique.
L'ardoise s'élèverait à plus de 50 millions de francs, selon Daniel Vischer, le conseiller national écologiste zurichois, cité jeudi dans le "Blick".