Les déclarations politiques se sont multipliées jeudi après les révélations selon lesquelles la directrice de La Poste Susanne Ruoff était au courant des manipulations comptables de CarPostal.
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Dans une prise de position, la ministre des Transports et de la Communication Doris Leuthard demande que toute la lumière soit faite et que tous les documents soient remis rapidement à son département.
La conseillère fédérale rappelle que l'Office fédéral des transports et La Poste sont en train d'analyser ce qui s'est passé ces dernières années. Les travaux sont en cours. La ministre rappelle que les entreprises liées à la Confédération comme CarPostal doivent agir de manière exemplaire lorsqu'il s'agit d'argent public, pour le bien des contribuables et de leurs clients.
La pression de rentabilité à l'origine du scandale?
Les services de Doris Leuthard soulignent par ailleurs que le Conseil fédéral donne des objectifs stratégiques à La Poste. Il attend des rendements conformes à la branche. Dans le trafic régional, un rendement nul prévaut.
Toujours selon le département, le gouvernement n'a en revanche aucune influence sur les activités d'exploitation. Il n'exerce pas non plus de fonction de surveillance. La stratégie et la politique commerciale relèvent du conseil d'administration.
Mais pour certains, l'affaire n'aurait pas éclaté si le Conseil fédéral n'imposait pas à La Poste de faire des profits élevés. Selon Zeynep Ersan Berdoz, directrice du magazine Bon à savoir, "il y a une pression extrêmement forte qui est mise sur la rentabilité, avec l'exigence de réaliser des bénéfices", affirme-t-elle au 19h30 de la RTS.
Il est très délicat de fixer à un service public de faire du profit. Soit on offre un service public, soit on veut faire du profit. On ne peut pas faire les deux ensemble.
Selon le point 3.1 des objectifs financiers fixés par le Conseil fédéral, La Poste doit en effet "réaliser un rendement conforme à la branche dans tous ses secteurs d'activité".
Ainsi, La Poste verse chaque année 200 millions de francs de dividendes à la Confédération, appliquant l'objectif à la lettre, y compris dans la division des cars postaux, au détriment des collectivité publiques.
Pour le conseiller national PLR soleurois Kurt Fluri, c'est la question même des objectifs de profit qui doit être repensée: "Il est très délicat de fixer à un service public de faire du profit. Soit on offre un service public, soit on veut faire du profit. Par définition, on ne peut pas faire les deux ensemble", a-t-il indiqué au 19h30.
"Je crois qu'elle ne peut plus conserver son poste"
Du côté des parlementaires, le ton est plus ferme. Concernant Susanne Ruoff, l'avis de Roger Nordmann, chef du groupe socialiste aux Chambres fédérales, est clair: "Je crois qu'elle ne peut plus conserver son poste", a-t-il dit dans l'émission de la radio alémanique Rendez-vous.
Dans les rangs bourgeois, il n'y a guère plus de compréhension envers Susanne Ruoff. "Si ces accusations sont vraies, elle doit être suspendue jusqu'à la fin de l'enquête", a déclaré Ulrich Giezendanner (UDC/AG) sur les ondes de la radio SRF. On aurait pu attendre une prise de position du président du conseil d'administration, Urs Schwaller, dès mardi, a ajouté l'Argovien.
Pour le conseiller national Thierry Burkart (PLR/AG), La Poste doit maintenant mettre les cartes sur la table et expliquer exactement de quoi il retourne. Il faudra dans un deuxième temps en tirer les conséquences personnelles. Le conseiller national Martin Candinas (PDC/GR) met quant à lui en garde contre une décision précipitée. "Il faut d'abord faire toute la lumière sur les faits".
Interrogé dans l'émission Forum, Christian Levrat estime que c'est désormais à Urs Schwaller, président du conseil d'administration de La Poste, de juger si Susanne Ruoff est encore crédible. "Je ne suis pas convaincu qu'elle fasse partie de la solution, mais c'est beaucoup trop court aujourd'hui de chasser des têtes."
tmun/fme avec ats