Sous la houlette de Roberto Balzaretti, les négociateurs suisses rechercheront une solution arbitrale qui pourra être activée si le comité mixte compétent n’est pas en mesure de régler le différend dans le cadre des accords bilatéraux.
Son fonctionnement: les parties nomment chacune un arbitre, les arbitres nomment un président. "Donc ce n'est pas le tribunal de l'autre partie qui tranche. On a fait ça dans des dizaines d’accords conclus avec des dizaines de pays. Et ça se pratique tous les jours au niveau de l’économie et des administrations", explique lundi Roberto Balzaretti dans l’émission Forum.
Le diable se cache dans les détails
La Cour européenne de justice, auparavant envisagée, n'est donc plus une option. La question des "juges étrangers" est sensible en Suisse. La Cour reste évidemment la gardienne du droit européen lorsqu'il est repris par la Suisse, "personne ne lui conteste ce rôle", a de son côté souligné Ignazio Cassis.
Bruxelles est "en principe" favorable à l'idée d'un tribunal arbitral, selon le conseiller fédéral. La question avait été abordée lors de la venue de Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, en novembre dernier. "Mais le diable se cache dans les détails".
Cinq accords concernés
L'accord institutionnel voulu par Bruxelles s'appliquerait uniquement à la libre circulation des personnes, la reconnaissance mutuelle en matière d’évaluation de la conformité, aux produits agricoles, au transport aérien et aux transports terrestres.
Le Conseil fédéral a réaffirmé sa volonté d’en exclure certains domaines. L’accord institutionnel "n’est pas un but en soi mais un instrument permettant de gérer de manière efficiente les cinq accords bilatéraux concernés en évitant une érosion de leur efficacité".
Peut-être que grâce au Brexit nous pourrons obtenir quelque chose dans des délais raisonnables
Et à ce stade, les négociations s'annoncent difficiles, concède Roberto Balzaretti: "Je ne suis pas sûr qu'il y ait une volonté d'un compromis acceptable pour nous. Je crois aussi que la situation globale, avec le Brexit, ne rend pas les choses plus simples. Mais peut-être que grâce au Brexit nous pourrons obtenir quelque chose dans des délais raisonnables.
"Si tout cela est bien fait, il ne s’agit pas de perdre de la souveraineté, mais de la déplacer à un autre niveau qui permette à notre économie, nos citoyens, nos entreprises, mais aussi à ceux qui font de la culture, du cinéma, de la science, etc… de participer à un grand marché. Donc tout cela est bien entendu dans l'intérêt du pays", poursuit Roberto Balzaretti.
Lignes rouges fixées
La Suisse entend en tout cas poser des lignes rouges dans les négociations sur un accord institutionnel. Berne veut maintenir toutes ses mesures d'accompagnement à l'accord sur la libre circulation des personnes.
La Suisse ne reprendra pas non plus la directive sur la citoyenneté européenne et ses développements (notamment, le droit à l'aide sociale pour les citoyens de l'UE).
ats/mh
Maintenant ou jamais
C'est maintenant ou jamais pour se mettre d'accord sur cet accord institutionnel, estime encore Ignazio Cassis.
Le Conseil fédéral est raisonnablement optimiste pour aboutir à quelque chose d'ici la fin de l'année, même si "ce sera dur".
Après, tout sera plus compliqué, avec les élections européennes prévues en 2019 et d'éventuelles complications liées au Brexit.
Autres négociations en cours
Parallèlement, les négociations se poursuivront dans plusieurs domaines: marché de l'électricité, équivalences financières, recherche, libéralisation des transports aériens, transports terrestres, accès aux données du programme de navigation spatiale Galileo, coopération en matière de santé publique, extension de l'accord agricole à toutes les denrées alimentaires et participation au programme Media pour la culture.
Le marché de l'électricité est une priorité pour le Conseil fédéral. Se pose toutefois le problème des aides de l’État (subventions et allégements fiscaux). Il n'est pas question de les laisser tomber, selon Ignazio Cassis.