"Ce qui est problématique avec cette nouvelle philosophie, c'est que l'on remet fondamentalement en question le principe de l'égalité et de la solidarité dans la loi sur l'assurance maladie (...) qui est de dire qu'il n'y a pas de différence au niveau des primes, que l'on soit vieux, jeune, homme femme, malade ou bien portant", lâche la conseillère nationale socialiste vaudoise Rebecca Ruiz, présidente du Service aux patients de Suisse romande et invitée mercredi de La Matinale de la RTS.
L'application santé proposée par Helsana suit son utilisateur à la trace et lui permet de cumuler des points en fonction de son activité physique, par exemple. Les bonus accumulés feront ensuite baisser sa prime maladie. D'autres assureurs, comme la CSS, ont aussi développé des systèmes similaires.
Mais nombreux sont les consommateurs et patients qui voient ce système de bonus d'un mauvais oeil, et le conseiller fédéral en charge de la Santé Alain Berset a été interpellé.
"Les assureurs ont déjà la possibilité de proposer des modèles alternatifs autorisés dans le cadre de la LaMal, par exemple celui du médecin-conseil avant d'aller voir un spécialiste", estime Rebecca Ruiz.
Le risque des "malus"
N'est-il pas logique de récompenser un assuré qui fait l'effort de bien manger et de faire du sport? "En introduisant des bonus, en réalité on discrimine certaines personnes. Par exemple celles qui n'ont pas la possibilité de faire du sport", répond-elle. La conseillère nationale y voit aussi une porte ouverte vers l'introduction de "malus", qui sont d'ailleurs "déjà sur la table du Parlement", selon elle.
La prochaine étape sera-t-elle de taxer les personnes obèses, les fumeurs ou les alcooliques? "Depuis l'introduction de la LaMal en 1996, il y a eu plusieurs tentatives de mettre à mal la philosophie de l'assurance de base. Les volontés de discriminer, de faire payer plus ceux qui ont plus de risques de tomber malade, ont échoué. Mais c'est de nouveau une petite brèche dans le système".
Feu vert de l'OFSP
L'Office fédéral de la santé publique (OFSP) a pourtant donné son feu vert. Rebecca Ruiz s'en dit "très étonnée" et estime qu'il faudrait un retour en arrière.
Elle évoque aussi "d'autres problèmes liés à la protection des données et au financement" induits par l'application. Pour elle, le fait que le système enregistre un certain nombre de données sur l'hygiène de vie du patient ouvre la porte à une "sélection" de la part des assurances, et à la "chasse aux bons risques".
"J'attends de voir comment va se positionner le préposé à la protection des données", conclut-elle. Une enquête a en effet été ouverte sur le cas de cette application en novembre dernier.
>> Lire : Enquête du préposé à la protection des données sur l'application santé d'Helsana
Propos recueillis par Romaine Morard
Adaptation web: Jessica Vial