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Activités sportives contre baisses de primes, les 4 questions qui fâchent

Sous surveillance d'appareils connectés, les activités sportives peuvent faire baisser les primes d’assurance maladie de certains groupes. Des offres qui peuvent poser problème tant en termes d'égalité que de protection des données.

Les groupes Helsana et CCS ont chacun lancé des applications qui permettent de réduire le coût de leurs assurances complémentaires. La condition: pratiquer régulièrement une activité physique, par exemple faire 10'000 pas par jour, le tout sous surveillance d'une montre ou autre appareil électronique qui transmet les données aux assureurs.

Ces programmes suscitent des inquiétudes, au point que le préposé à la protection des données a ouvert une enquête concernant l'offre d'Helsana. Tour d'horizon des risques générés par cette santé connectée.

1. Ces programmes favorisent-ils la chasse aux bons risques?

Helsana propose son application à tous les assurés. Pour Rebecca Ruiz, conseillère nationale socialiste et présidente de la section romande de la Fédération suisse des patients, cette évolution représente "une mine d'or". "Ces informations obtenues à bon compte" favoriseraient ainsi "la chasse aux bons risques". Autrement dit, elles permettraient à Helsana de trier les assurés à qui elle accorde ou refuse des complémentaires, en fonction de leur hygiène de vie. Le groupe s’en défend catégoriquement. (Helsana a refusé une interview filmée mais a répondu par écrit aux questions de Mise au point, ndlr).

CSS propose aussi une application, mais seulement à ses assurés complémentaires. Concrètement, l'assuré réduit de 40 centimes sa facture chaque jour où il effectue plus de 10'000 pas. Sa porte-parole, Nina Mayer, estime que le programme doit aider à "intégrer davantage la responsabilité individuelle qui est tellement importante pour notre système".

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Votre assurance veut tout savoir de vous / Mise au point / 10 min. / le 15 avril 2018

2. Ces incitations sont-elles efficaces?

Jean-Gabriel Jeannot, médecin à Neuchâtel, reste dubitatif quant aux effets à long terme de cette prévention intéressée. "Une étude américaine a montré que lorsqu’on prend 500 personnes à qui on donne des conseils alimentaires pour qu’elles perdent du poids et qu’on donne à la moitié d’entre elles un podomètre et à l’autre pas, après deux ans, celles qui ont perdu le plus de poids, ce sont celles qui n’avaient pas de podomètre", explique le généraliste.

Ainsi, même si Nina Mayer estime que "la prévention va être un élément très important" dans la lutte contre la hausse des coûts de la santé, Jean-Gabriel Jeannot considère que la promotion de la santé devrait rester entre les mains du corps médical. Il faut, selon lui, "laisser ce travail-là aux gens dont c’est le métier".

3. L'égalité de traitement est-elle respectée?

Ces programmes présentent à ce jour une particularité: il s'adresse essentiellement aux gens valides, capables, par exemple, d'effectuer les pas requis. "Dix milles pas c'est énorme, même un, c'est déjà beaucoup!" S'ils s'en amusent dans un éclat de rire, les joueurs des Aigles de Meyrin, équipe de basket en fauteuil roulant, n'en ressentent pas moins l'injustice de ces offres dont ils sont, de fait, exclus. "C’est bien si on est en bonne santé, que tout va bien, l'assureur ne prend pas trop de risques", estime Julien Robert, enclin à penser que "les assureurs sont plus là pour faire de l’argent que pour faire du social".

Nina Mayer considère que l'injustice apparente de traitement n'est pas avérée, dans la mesure où la participation est "facultative" et les récompenses sont "raisonnables". Cela éviterait que "les personnes en situation difficile se sentent obligées de participer au programme".

4. Une nouvelle menace pour les données personnelles?

"Il faut être attentif lorsqu’on utilise ce type de technologies qui récoltent des données de santé et qui peuvent circuler à travers la toile". S'il refuse de se prononcer sur l'enquête en cours concernant l'application d'Helsana, Jean-Philippe Walter, préposé fédéral suppléant à la protection des données, recommande la prudence en matière de données médicales. Si ces données devaient échapper aux acteurs légitimes, elles pourraient donner lieu à "des pressions intolérables sur les individus", avertit-il. Du côté de CSS, on garantit que l'application se contente de fournir "le nombre de pas", pas nécessairement la plus sensible des données.

Pour Jean-Philippe Walter, il n'en est pas moins urgent qu'il y ait une réaction politique afin de revoir le cadre législatif et protéger les assurés d'utilisation abusive de leurs données.

Malgré ces questions technologiques et juridiques, le niveau d'alerte au sein de la population reste assez bas. Un sondage révélait l’année dernière que la moitié de la population suisse était prête à porter un bracelet connecté pour payer moins de primes maladie.

Pierre Bavaud/tyf

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