"Ce qui s'est passé en 68 n'est pas tombé du ciel. Toutes les composantes de Mai 68 préexistaient en Suisse, comme en Allemagne ou en Italie où il y a eu des mouvements de contestation très violents, même avant ce qui s'est passé en France", rappelle Alex Mayenfisch dans Histoire vivante (à écouter ci-dessus).
"Bien sûr, la Suisse n'est pas le haut lieu de la contestation sociale, ce n'est pas là que le plus de choses se sont passées, mais il y a quand même eu du mouvement", poursuit le réalisateur lausannois.
Une décennie en revue
Son film "Mai 68 avant l'heure"* passe ainsi en revue la décennie qui précéda le mouvement social français sous l'angle suisse. Il raconte en 52 minutes comment cette "société très corsetée se décrispe un peu" en écoutant de la musique yéyé et au fil de manifestations pacifistes.
Mais parcourir les années 1960 avec Alex Mayenfisch, c'est aussi (re)découvrir une forme d'insolence et une société figée qu'on a oubliées. Un temps où les filles n'avaient pas le droit d'aller à l'école en pantalon et où porter un jean était mal vu. A cette époque, les bars à café avec jukebox émergaient peu à peu, des lieux "où on buvait très peu d'alcool", mais des lieux de rencontres réservés aux jeunes, où ils partageaient leurs valeurs, refaisaient le monde et interrogeaient l'ordre établi.
"Il faut être lucides, la part des jeunes qui avaient une conscience politique représentait une minorité, mais cela a lancé une dynamique qui les a fait se sentir partie prenante dans la société", relève Alex Mayenfisch. "Après 68, cela a permis l'éclosion des mouvements féministes et antinucléaires".
Propos recueillis par Jean Leclerc
Adaptation web: Juliette Galeazzi
* "Mai 68 avant l'heure" diffusé dimanche 29 avril sur RTS Deux