L'association française SOS homophobie s'inquiète dans son rapport annuel paru mardi d'une recrudescence des actes de violence en raison de l'orientation sexuelle ou de l'identité de genre. En 2017, elle a reçu 1650 témoignages et signalements et estime le bilan "préoccupant" après deux années de baisse. A lui seul, le nombre d'agressions physiques a connu une augmentation de 15%.
Le constat est-il le même en Suisse? "Le souci en Suisse, c'est que l'homophobie et la transphobie ne sont pas des délits au sens pénal du terme, contrairement à la France, par exemple. S'il y a une agression, on n'aura pas de statistique car ce n'est pas répréhensible", répond Manon Pellet-Zbinden, éducatrice sociale et co-responsable du Refuge à Genève, et invitée mercredi de La Matinale de la RTS. La structure pour laquelle elle travaille est encore unique en Suisse: elle offre un hébergement d'urgence et un lieu d'écoute à des jeunes chassés de leur famille à cause de leur orientation sexuelle.
Sur la table du Parlement
A ses yeux, "il faut absolument avoir une loi pour aider à combattre l'homophobie et la transphobie". A ce titre, un projet de la commission des affaires juridiques du Conseil national, issu d'une initiative de Mathias Reynard (PS/VS) en 2017, propose de compléter la norme antiraciste en y ajoutant l'orientation sexuelle et l'identité du genre.
Manon Pellet-Zbinden salue toutefois le rôle des associations: "Plus on fait de prévention, plus on parle à un niveau élevé, mieux c'est".
Pour elle, le principal facteur de l'homophobie en Suisse est "l'ignorance." "Il faut libérer la parole, banaliser, dire que la diversité existe".
Propos recueillis par Yann Amedro
Adaptation web: Jessica Vial
Le Refuge, un modèle unique en Suisse
Le Refuge a ouvert à Genève en 2015, inspiré d'un modèle français. Depuis, la structure a suivi environ 150 jeunes: majoritairement des hommes gay, mais aussi des femmes et de plus en plus de personnes trans, selon Manon Pellet-Zbinden.
Le lieu d'accueil, qui oeuvre aussi par la médiation familiale et les interventions en milieu scolaire, est encore unique en Suisse et elle accueille des jeunes de toute la Suisse romande. Pour Manon Pellet-Zbinden, il n'est "pas impossible" que la structure essaime dans d'autres cantons, car Le Refuge a déjà été approché plusieurs fois.
"Mais c'est difficile de pérenniser ce genre de projets en termes financiers", glisse-t-elle. Elle précise que Le Refuge dépend "pour deux tiers de fondations privées et pour un tiers des financements des cantons et des communes genevoises".
Ecouter la première partie de l'interview sur le rôle du Refuge: