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Un double oui le 23 septembre "n'améliorera pas la vie des paysans"

Philippe Nantermod, vice-président du PLR. [Keystone - Olivier Maire]
L'invité-e de Romain Clivaz - Philippe Nantermod, vice-président du PLR / L'invité-e de Romain Clivaz / 9 min. / le 21 août 2018
Le conseiller national PLR valaisan Philippe Nantermod s'engage contre les deux initiatives "pour des aliments équitables" et "pour la souveraineté alimentaire". Il dénonce une "dictature des bons sentiments".

Le vice-président du PLR suisse, interrogé dans La Matinale de la RTS, souligne que ces deux initiatives, soumis au vote le 23 septembre, posent énormément de problèmes et sont dangereuses: "C'est un peu la dictature des bons sentiments, on nous donne des grands slogans sur le consommer local, les circuits courts, sur la nécessité de lutter contre les OGM, on met tout ça ensemble et on espère obtenir un oui."

Et d'insister: "Si on met en oeuvre ces textes aujourd'hui, on aura des problèmes d'approvisionnement en Suisse, on aura des problèmes de coût de la vie et on ne va pas forcément améliorer la vie des paysans."

Des barrières douanières qui ne protègent pas les paysans

"Enormément des éléments contenus dans ces initiatives sont déjà mis en oeuvre dans la Constitution", rappelle le Valaisan, mentionnant notamment l'interdiction des OGM. Philippe Nantermod critique également l'introduction de nouvelles barrières douanières, qui ne protègent pas la situation des paysans, à l'image de ce qui peut être observé dans le domaine du lait.

Dénonçant l'appareil bureaucratique qui devrait être mis en place pour contrôler à l'étranger la qualité des productions des marchandises importées, Philippe Nantermod qualifie même de "colonisateur" l'idée d'imposer à l'étranger des normes de production suisses.

Le conseiller national PLR indique que la Suisse dépense chaque année 7 milliards de francs pour soutenir l'agriculture, une moitié en paiements directs et une moitié en taxe douanière. "Le problème de l'initiative sur la souveraineté alimentaire, c'est qu'elle veut ériger en modèle un système qui n'est pas viable à long terme."

Et de rappeler que le texte interdit tous les soutiens à l'exportation, ce qui aurait des conséquences pour l'industrie du chocolat au lait ou pour celle du lait en poudre, qui ne pourraient plus être soutenues à l'exportation et ne seraient plus compétitives sur le marché international.

Propos recueillis par Romain Clivaz

Adaptation web: Eric Butticaz

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Un seul comité contre deux initiatives, une erreur stratégique?

Le camp du double non aux initiatives "pour des aliments équitables" et "pour la souveraineté alimentaire" est en grande difficulté. Le sondage GFS paru la semaine passée montre un fort soutien populaire à ces deux textes - plus de trois quarts des sondés leur sont favorables.

Les opposants aux deux textes multiplient les conférences de presse pour essayer de faire entendre leur voix, mais ils pourraient bien avoir commis une erreur stratégique en ne constituant qu'un seul comité contre ces deux initiatives. La logique était de combattre en même temps deux textes qui gravitent dans un domaine similaire, l'agro-alimentaire. Une stratégie risquée à plusieurs titres. D'abord celui du manque de lisibilité, de tout mélanger, avec des arguments trop généraux et qui ne font pas mouche.

Risque de divisions internes
Cette stratégie engendre aussi le risque de division interne au sein de ce comité, comme le reconnaît le conseiller national UDC fribourgeois Pierre-André Page. "Je pense que c'était une erreur de faire un seul comité pour les deux initiatives. Typiquement, je milite contre l'initiative "pour des aliments équitables", mais pas contre l'autre, donc finalement il faut vraiment que le citoyen lise bien, soit bien informé de ce qui se passe, car ce n'est pas aussi simple que cela." Une division qui se retrouve aussi dans le monde paysan.

La situation est aussi défavorable pour les opposants qui tentent de faire entendre une voix qui va à l'encontre de l'engouement des Suisses pour les produits bio, pour le local, et même pour la paysannerie en général.

La campagne n'est pas encore jouée
Pour autant, il reste difficile de pronostiquer dès maintenant un double oui le 23 septembre prochain. Même si les opposants sont en ordre disparate, ils peuvent compter sur l'érosion naturelle du soutien populaire aux initiatives. La phase chaude de la campagne n'a pas encore commencé - les grands moyens seront sans doute déployés.

D'ailleurs, ce dimanche encore, dans l'autre camp, les partisans du oui battaient le rappel des troupes avec une communication interne inquiète, dans laquelle on pouvait lire: "Ce sondage très positif est trompeur. Les adversaires de l'initiative vont désormais investir beaucoup d'argent." Et de lancer un appel aux dons pour cette bataille qui ne fait que commencer.
Thibaut Schaller