Plusieurs études, en Suisse et à l'étranger, montrent que les paysans sont une population particulièrement à risque. A l'occasion de la journée mondiale de prévention du suicide, des acteurs des milieux agricoles et des administrations cantonales se réunissent à Zollikofen dans le canton de Berne.
Ils vont se pencher sur le modèle de prévention mis en place il y a trois ans dans le canton de Vaud, et dont le canton de Neuchâtel s'est déjà inspiré. Il est basé sur la formation de "sentinelles" - des personnes qui côtoient régulièrement les paysans, comme des vétérinaires ou des laitiers. Ces derniers jouent le rôle de relais entre les agriculteurs et les professionnels de la santé.
Réagir aux signaux de détresse
"La mort est quelque chose dont on parle extrêmement peu dans notre société", rappelle le chef de la Direction générale de l'agriculture à l'Etat de Vaud. "C'est la raison pour laquelle on a mis en place un système qui permet d'avoir des réponses et de savoir quoi faire lorsqu'un agriculteur émet des signaux de détresse", poursuit Frédéric Brand.
Et si la tendance au suicide est plus marquée dans cette profession, c'est parce que les remises en question du modèle agricole pèsent sur le moral. "Actuellement, avec la pression économique, beaucoup d'agriculteurs n'ont plus d'employés", constate Frédéric Brand. "Donc tout ce contexte, avec encore une couche de formulaires administratifs, fait que - pour certains agriculteurs seuls et isolés - la situation devient difficilement tenable."
"On n'en fait pas trop pour cette population!"
Ce constat est partagé par le psychiatre Stéphane Saillant, vice-président du Groupe Romand Prévention Suicide (GPRS). "On n'est clairement pas en train d'en faire trop pour cette population", souligne-t-il. "On sait que les professionnels du monde agricole ont de la peine à pouvoir avoir accès aux soins - c'est lié au fait que dans les zones rurales, il y a moins de services de soins, moins de psychiatres, moins de psychologues."
Le praticien constate aussi que parler de dépression, parler de ses émotions "est quelque chose qui n'est pas forcément naturel dans le monde agricole."
Mais les mentalités doivent aussi évoluer. Et cette première journée nationale de sensibilisation au suicide dans le monde agricole doit surtout montrer que des solutions existent pour s'en sortir.
Delphine Gendre/oang