Une vaste salle où des dizaines de scientifiques calculent des trajectoires pendant qu'une communication en direct avec les astronautes s'affiche sur de multiples écrans: telle est l'image que l'on se fait d'un centre spatial.
En Suisse, on est loin de Cap Canaveral. Aucune base de lancement ni laboratoire de recherche, mais quelques bureaux et des ordinateurs tout au plus. Suite à la demande de la RTS, l’armée a accepté de présenter les missions de sa cellule espace.
La structure se targue pourtant de disposer d’un noyau professionnel. Dans la réalité, il s'agit d'un équivalent plein temps, autour duquel gravite une dizaine d'officiers, actifs au civil dans la branche du spatial. Ils effectuent leurs cours de répétition au sein de cette cellule espace quatre semaines par année.
La petite Suisse face aux géants de l'espace
A titre de comparaison, la NASA emploie quelque 20'000 personnes pour un budget total de 19 milliards de dollars en 2018. De son côté, le programme spatial chinois peut compter sur une armée de 200'000 scientifiques. La Suisse ne joue manifestement pas dans cette cour-là. Pourquoi donc créer cette structure avec si peu de moyens?
Comme souvent en Suisse, c'est petit mais efficace.
Il fallait centraliser toutes les activités liées de près ou de loin à l’espace, expliquent les responsables de la cellule. Des branches aussi variées que les renseignements militaires, les forces aériennes ou encore la cartographie étaient concernées, détaille Rolf Siegenthaler, numéro deux du commandement des opérations de l’armée suisse.
L'objectif principal était de mettre sur pied un centre de compétences spatiales pour permettre à l'armée suisse de suivre les évolutions dans le domaine spatial, tant privé et civil que militaire. Un "travail de veille", ajoute Rolf Siegenthaler.
L'ombre de la défunte société vaudoise S3
De la veille, mais également des résultats concrets, selon l'armée, notamment dans le domaine des satellites. "L'armée a besoin de savoir quand elle pourrait être observée et quand des images de ses propres activités pourraient être prises", explique Ludovic Monnerat, chef de la cellule espace. Une nécessité valable aussi bien lors des missions normales de l'armée que dans les situations de crise ou de conflit, ajoute-t-il.
Un satellite suisse n'est donc pas prévu de sitôt, même si un rapprochement secret avec la société S3 avait eu lieu, comme l'a révélé la RTS en juin dernier. Le Service de renseignement militaire envisageait de se fournir auprès de la défunte entreprise payernoise.
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Scepticisme parmi les élus à Berne
Si un projet aussi ambitieux devait être mis sur pied aujourd'hui, il nécessiterait une décision politique en raison des coûts occasionnés, assurent les responsables de la cellule espace. En attendant d'éventuels développements, l'existence de cette micro-structure au sein de l'armée intrigue toujours à Berne.
Les élus des commissions de politique de sécurité, déjà sceptiques en juin, ne sont pas rassurés aujourd'hui. Il leur faudra plus qu'une visite à la caserne pour se laisser convaincre de l'utilité de la cellule espace de l'armée suisse.
Pietro Bugnon
Texte web: Stefan Renna