Hêtre ou pas hêtre, comment le réchauffement climatique va changer le visage de nos forêts
En longeant les forêts de basse altitude du Jura, on remarque des arbres rougeoyants en plein été. Un paysage automnal qui désole le garde-forestier du secteur de Chevenez, Joseph Saucy: "Regardez ce hêtre là devant nous, il n'y a plus de feuilles, toute la cime est déjà morte depuis plusieurs années".
Ce matin, Joseph Saucy, avec son aérosol de peinture orange, a la délicate tâche de désigner les arbres qu'il faudra abattre cet automne. "Aujourd'hui avec les forêts qu'on a, on n'a plus vraiment le choix des arbres, on coupe ce qui est sec au bord des chemins et on essaye de sauver un peu le bois qu'on peut encore exploiter".
Au bord du chemin, un hêtre d'une trentaine de mètres finira sa vie prématurément, "l'arbre est trop dangereux car la cime est sèche et quand il y a du vent, les branches peuvent casser. "
"Cela fait depuis 2018, avec les premiers coups de chaleur, qu'on voit des hêtres et des mélèzes complètement secs sur pied".
À mi-parcours de l'actuel cinquième Inventaire forestier national (IFN5 années 2018-2022), les dégâts sont nets. Dans le Jura, actuellement un arbre sur dix est mort et un sur cinq présente des dommages.
Quels arbres pour demain?
La forêt a une fonction sociale mais aussi économique, l'industrie du bois représente plus de 80'000 emplois en Suisse. Elle joue également un rôle primordial de protection contre les dangers naturels comme les glissements de terrain ou les avalanches.
Pour que la forêt conserve ces fonctions, l'Institut fédéral de recherche sur la forêt, la neige et le paysage (WSL) mène des recherches pour trouver quelles essences pourraient résister au changement climatique.
Cinquante-sept plantations expérimentales ont été créées dans toute la Suisse par des services forestiers cantonaux et des chercheurs du WSL. Durant plusieurs décennies, les scientifiques vont observer et analyser la croissance de ces 55'000 plants. Objectif: voir si des cèdres du Liban, des érables de Turquie ou des sapins Douglas américains pourraient à l'avenir peupler nos forêts.
"L'idée, ce n'est pas de remplacer tous nos arbres", explique Robert Jenni, collaborateur scientifique pour l'Office fédéral de l'environnement (OFEV): "Il s'agit d'apporter plus de variétés dans nos forêts pour les rendre moins vulnérables".
Le scientifique nous rassure: "La forêt était là avant nous, elle sera là après nous et elle sera encore plus belle".
Katia Bitsch/ Joëlle Cachin