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Kadhafi interdit à Swiss de voler vers Tripoli

Mouammar Kadhafi, main de fer, tient tête aux autorités suisses.
Mouammar Kadhafi, main de fer, tient tête aux autorités suisses.
Swiss ne vole plus vers Tripoli. La compagnie a supprimé dimanche sa dernière liaison hebdomadaire vers la Libye à la demande de Tripoli, qui poursuit sa politique de représailles depuis la crise déclenchée par l'arrestation d'Hannibal Kadhafi.

«Nous ne pouvons plus voler», a indiqué mardi Jean-Claude
Donzel, porte-parole de Swiss, sur les ondes de la Radio suisse
romande (RSR). Il confirmait une information du journal gratuit
alémanique «Cash» et du quotidien fribourgeois « La Liberté ».

Interrogé à son tour par la RSR, le président de la
Confédération Pascal Couchepin s'est dit «déçu» mais pas surpris
par la décision libyenne, Tripoli ayant menacé à plusieurs reprises
de prendre des sanctions économiques contre la Suisse. Il a espéré
que cette crise pourra être surmontée.



La Suisse et la Libye sont engagées depuis juillet dans des
négociations pour régler le différend né de l'arrestation à Genève
d'Hannibal Kadhafi et de sa femme suite à une plainte de leurs
domestiques pour maltraitance (lire
ci-contre)
.

Voyages «déconseillés»

«Nous avons reçu une lettre de l'aviation civile libyenne en
début de semaine dernière», a précisé le porte-parole de Swiss. La
Libye indique que «pour des raisons techniques en relation avec un
projet à l'aéroport de Tripoli», Swiss ne peut plus relier Zurich à
la capitale libyenne. «A notre connaissance, nous sommes la seule
compagnie touchée», a noté Jean-Claude Donzel.



Les passagers qui avaient prévu de se rendre à Tripoli voyageront
avec d'autres compagnies. Toutefois, dans ses conseils aux voyageurs , le
Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) «déconseille de
se rendre en Libye». Il indique encore que «les autorités libyennes
réagissent avec diverses mesures à l'encontre des Suisses et des
entreprises suisses établies en Libye, comme par exemple
l'arrestation de citoyens suisses ou l'entrave aux activités
commerciales».



Swiss a des «contacts étroits» avec le Département fédéral des
affaires étrangères (DFAE) et l'Office fédéral de l'aviation civile
(OFAC). «Ce sont eux qui nous diront la suite à donner», a ajouté
Jean-Claude Donzel.

Vols libyens supprimés

La compagnie nationale libyenne
Afriqiyah Airways avait supprimé en octobre deux de ses trois
liaisons hebdomadaires entre Genève et Tripoli. Le 20 juillet, cinq
jours après l'arrestation du fils du colonel Mouamar Kadhafi, les
autorités libyennes avaient imposé à Swiss de réduire ses trois
rotations hebdomadaires vers la Libye à une seule, celle du
dimanche entre Zurich et Tripoli. Elles invoquaient déjà alors des
«raisons techniques».



Le retrait de la plainte à Genève, contre un dédommagement
financier, n'a pas permis de détendre la situation au plan
diplomatique. Mouamar Kadhafi exige des excuses pour les méthodes
musclées de la police genevoise, méthodes qui, selon cette
dernière, étaient justifiées par la dangerosité présumée du
suspect.



En réponse à l'arrestation d'Hannibal, Tripoli a pris une série de
mesures de rétorsion. Ainsi, les entreprises helvétiques ne peuvent
pas exercer leurs activités librement - les bureaux d'ABB et Nestlé
ont été fermés - et deux ressortissants suisses (dont l'un est
collaborateur d'ABB) ne sont toujours pas autorisés à quitter le
pays, mais sont toutefois libres de leurs mouvements.

Longues négociations en vue

De plus, les ports libyens se sont annoncés «fermés» aux navires
commerciaux helvétiques, même si Berne n'a reçu aucune confirmation
officielle de cette mesure. L'agence officielle libyenne Jana a
indiqué en octobre que Tripoli arrêtait «toute coopération
économique avec la Suisse», en raison des «mauvais traitements»
infligés «à des diplomates et des hommes d'affaires libyens» par la
police genevoise.



Les négociations engagées entre Berne et Tripoli risquent de
prendre du temps, avait indiqué il y a un mois Micheline Calmy-Rey,
cheffe du DFAE, devant la presse. «Nous sommes face à un partenaire
qui a le temps et qui nous l'a fait savoir», avait-elle déclaré.
Mardi, le porte-parole du DFAE avait déclaré que les «discussions
avec la partie libyenne sont difficiles, mais elles se
poursuivent».



ats/bri

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Rappel des faits

Les relations entre la Suisse et la Libye se sont nettement dégradées en juillet après l'arrestation à Genève d'Hannibal Kadhafi et de son épouse Aline à la suite d'une plainte pour mauvais traitements déposée par deux domestiques.

Le couple a été libéré contre le paiement d'une caution d'un demi-million de francs provoquant la fureur de Tripoli qui avait menacé alors de suspendre ses exportations de pétrole vers la Suisse.

Début septembre, la crise semblait en voie de règlement suite au retrait de la plainte des deux domestiques (une Tunisienne et un Marocain) qui avaient reçu des indemnités, permettant au dossier judiciaire d'être classé. Mais Tripoli exigeait encore des "excuses".

En octobre, les relations se sont à nouveau envenimées. La Libye a annoncé la suspension de ses livraisons de pétrole, le retrait des avoirs libyens des banques suisses (estimés à 7 milliards de dollars) et "l'arrêt de tous les aspects de la coopération" entre les deux pays.

Le président de la Confédération Pascal Couchepin avait estimé en novembre que l'issue du dossier dépendait "du guide suprême libyen".

Discussions secrètes

Selon la Tribune de Genève de mardi, des discussions secrètes se déroulent actuellement entre les deux capitales.

Citant des "procès verbaux confidentiels" de ces discussions que le journal a pu consulter, la Tribune affirme que Tripoli réclame à la Suisse le versement de 300'000 francs au Fonds mondial de l'ONU pour l'enfance (Unicef) "afin d'enterrer la hache de guerre".

Le journal ajoute que la Libye exige toujours des excuses ainsi que des sanctions pour les responsables de "l'interpellation injustifiée" d'Hannibal et de sa femme.