Cette commémoration s'est déroulée dans un climat de grande
tension avec l'opposition appuyée par Damas et emmenée par le
Hezbollah chiite qui organisait de son côté dans la banlieue sud de
Beyrouth les obsèques d'Imad Moughnieh, un homme clé du mouvement
assassiné mardi à Damas (lire ci-contre).
A l'appel de la majorité, les manifestants, brandissant des
drapeaux libanais et des portraits de Rafic Hariri, ont convergé
sous la pluie vers la Place des Martyrs, placée sous très haute
sécurité par la police et l'armée. Les médias libanais soutenant la
majorité ont affirmé que des centaines de milliers de personnes se
trouvaient Place des Martyrs. Mais ni la police ni les
organisateurs ne pouvaient confirmer ces chiffres.
Climat tendu
Ces rassemblements interviennent dans un climat de tensions
exacerbées par des accrochages armés entre camps rivaux, ayant fait
des blessés, et des discours belliqueux d'hommes politiques qui ont
évoqué le spectre d'une nouvelle guerre civile. La situation s'est
particulièrement tendue après une manifestation de l'opposition fin
janvier qui s'était soldée par la mort de sept manifestants dont
des membres du Hezbollah.
Des soldats quadrillaient le centre de Beyrouth et une enceinte de
fer a été installée sur la Place des martyrs pour séparer les
partisans de la majorité de ceux de l'opposition qui y tiennent
depuis plus d'un an un sit-in dans des tentes. La majorité
antisyrienne a déployé son propre service d'ordre comptant quelques
centaines d'hommes non armés, identifiables à leurs survêtements
bleus. La circulation des motos, souvent utilisées par les
militants pour mener des attaques, a été interdite. Les commerces
et les écoles sont restés fermés en cette journée décrétée
fériée.
Toujours pas de président
Les manifestants scandaient des slogans réclamant l'élection
d'un président de la République par le Parlement. Le Liban, qui
connaît sa crise la plus grave depuis la fin de la guerre civile
(1975-1990), est sans président depuis fin novembre en raison de
profondes divergences entre la majorité et l'opposition.
Une séance parlementaire pour élire le président a été reportée 14
fois, la majorité et l'opposition n'arrivant pas à s'entendre sur
la répartition du pouvoir au sein du futur gouvernement. La
prochaine séance est prévue le 26 février.
afp/mej/hof
Rappel des faits
Le 14 février 2005, l'explosion d'une voiture piégée avait tué Rafic Hariri et 22 autres personnes et suscité une mobilisation sans précédent des Libanais contre la présence militaire syrienne au Liban.
Pointée du doigt, la Syrie, qui avait été contrainte de retirer en avril 2005 ses soldats du Liban après trois décennies de présence, a nié toute implication.
Une statue de l'ancien Premier ministre a été inaugurée mercredi devant l'hôtel Saint-Georges, sur le bord de mer, où s'était produit l'attentat.
Le Hezbollah enterre Imad Moughnieh
Le Hezbollah a de son côté appelé ses militants à se mobiliser en nombre pour rendre un dernier hommage à Imad Moughnieh, l'un des fondateurs de sa branche armée en 1983, qui était recherché depuis 20 ans pour de nombreux attentats et enlèvements par Interpol et les Etats-Unis.
Il a été tué mardi dans un attentat à la voiture piégée et le Hezbollah a accusé Israël qui a démenti. Pour les journaux de l'opposition libanaise, ce meurtre est un "coup très dur" porté au Hezbollah, alors que la majorité a condamné l'assassinat.
Ses funérailles ont réuni des milliers de partisans de l'opposition dans la banlieue sud de Beyrouth. Le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah a imputé sa mort à Israël, à qui il a déclaré "une guerre ouverte".
Le chef de la diplomatie iranienne Manouchehr Mottaki a lu un message du président ultraconservateur iranien Mahmoud Ahmadinejad qui a lui aussi dénoncé les "opérations criminelles d'Israël", accusé d'être derrière l'attentat à la voiture piégée qui a coûté la vie à Moughnieh. Israël a nié toute implication.
Le guide suprême iranien l'ayatollah Ali Khamenei avait adressé plus tôt ses condoléances au chef du Hezbollah Hassan Nasrallah pour le "martyre" de Moughnieh, selon les autorités iraniennes.