Ce verdict a été salué par des cris de joie et des
applaudissements dans la petite salle du tribunal de La Plata (57
km de Buenos Aires) où s'est ouvert ce procés le 5 juillet.
Des Mères de la place de mai, organisation créée pendant la
dictature par des mères de "disparus", se sont levées sitôt connue
la sentence pour manifester leur joie. C'est une décision
"historique, "quelque chose de très fort", a déclaré, très émue,
Taty Almeida, l'une de ces Mères, interrogée par les télévisions
argentines quelques minutes après l'annonce de ce verdict.
Accusations effarantes
Quelques heures aupravant, les avocats de l'ancien aumonier de
la police de la province de Buenos Aires, où se trouve La Plata,
avaient réclamé son acquittement, estimant insuffisantes les
preuves de sa culpabilité. Cristian Won Vernich répondait des
accusations de complicité dans sept meurtres, 31 cas de tortures et
42 enlèvements dans la province de Buenos Aires. L'accusation et le
parquet avaient de leur côté réclamé lundi la prison à perpétuité
pour ce prêtre, arrêté en 2003.
L'ancien aumônier, un moment réfugié au Chili, fut le
collaborateur et confesseur du chef de la police de cette province,
Ramon Camps, un des principaux tortionnaires de la dictature
militaire.
Pas pasteur, mais interrogateur
Dans son réquisitoire, le procureur Carlos Dulau Dumm a
considéré comme largement établie la présence de Von Wernich dans
les centres clandestins de détention et de torture. "Il est clair
que Von Wernich n'avait pas de fonction pastorale, mais qu'il
jouait un rôle dynamique et qu'il était un interrogateur habituel
dans ces centres de détention", a-t-il déclaré.
Von Wernich, revêtu comme à l'accoutumée d'un gilet pare-balles et
abrité derrière une vitre blindée, était présent au moment de la
lecture de sa sentence. Dans une déclaration avant l'énoncé du
verdict, il avait plaidé, citant la Bible à plusieurs reprises,
pour une réconciliation de tous les Argentins. "Si nous voulons
parvenir à la vérité, faisons-le dans la paix, dans la
réconciliation. L'homme doit se réconcilier", a-t-il notamment
déclaré devant ses juges.
Agences/fm
Relance du débat sur la complicité de l'église
Ce premier procès contre un prêtre catholique pour son rôle présumé pendant la dictature a relancé le débat sur l'attitude de l'Eglise, influente en Argentine, et principalement de sa hiérarchie pendant ces années noires.
Le prix Nobel de la paix Adolfo Perez Esquivel, interrogé lundi par la presse devant le tribunal, a espéré que l'Eglise, qui a jusqu'à présent gardé le silence, apporte des éclaircissements sur son rôle pendant la dictature. "L'Eglise doit se prononcer. Nous espérons une clarification de la part des autorités ecclésiastiques", a-t-il déclaré.
Une centaine de personnes sont venues témoigner lors de ce procès, dont des survivants des centres de détention, certains affirmant reconnaître ce prêtre comme étant l'un de leurs tortionnaires.
Quelque 30.000 personnes ont "disparu", en fait enlevées et assassinées, pendant la dictature, selon le décompte des organisations de défense des droits de l'Homme.