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Le système éducatif suisse passé au crible

Les élèves valaisans sont ceux qui passent le plus de temps sur les bancs de l'école primaire.
Les élèves valaisans sont ceux qui passent le plus de temps sur les bancs de l'école primaire.
Hétérogène et complexe, le système suisse de formation n'avait, jusqu'ici, jamais bénéficié d'une vue d'ensemble. Le premier rapport national sur l'éducation en Suisse vient combler cette lacune. Il doit aussi servir de base aux décisions politiques.

Présentée aux médias jeudi à Berne, cette bible de plus de 300
pages, pesant son kilo, est le fruit des recherches de l'équipe du
professeur Stefan C. Wolter, directeur du Centre suisse de
coordination pour la recherche en éducation (CSRE).



Sur mandat de la Confédération et des cantons, ce rapport dresse
un état des lieux allant de l'école obligatoire aux universités en
passant par la formation professionnelle, la formation continue ou
l'enseignement spécialisé.

Fortes disparités entre cantons

Au contraire d'études internationales, comme PISA, le rapport
prend en compte l'extrême variété du système scolaire suisse,
explique Hans Ambühl, secrétaire général de la Conférence
intercantonale des directeurs de l'instruction publique (CDIP). Les
âges d'entrée à l'école, les langues parlées (cantons bilingues ou
non), les heures d'enseignement ou le budget de la formation
continuent de varier énormément d'un canton à l'autre.

Par exemple, les petits Valaisans sont ceux qui passent le plus
de temps sur les bancs de l'école primaire, soit pas loin de 1000
heures. A l'inverse, les enfants de Bâle-Ville y passent un peu
plus de 600 heures. "On ignore encore quelles conséquences peuvent
avoir ces différence", explique Stefan Wolter. Ce n'est pas
seulement le nombre d'heures qui compte mais aussi la qualité des
programmes.



Pour l'école obligatoire, l'harmonisation scolaire avance
cependant à grands pas avec le concordat intercantonal Harmos et
les plans d'études communs, précise Hans Ambühl. Ce rapport permet
ainsi d'accompagner le processus et de combler des lacunes, fait-il
valoir.

Améliorer la scolarisation des étrangers

Le rapport se penche sur l'égalité des chances: entre hommes et
femmes, de même qu'entre Suisses et étrangers. Il constate que les
filles restent un peu moins nombreuses que les garçons parmi les
90% de jeunes à terminer leur scolarité obligatoire en décrochant
un diplôme de secondaire II comme un baccalauréat ou une maturité
professionnelle.



Ce taux de 90% reste en deçà de l'objectif de 95% de diplômés
d'ici 2015, observe Ursula Renold, directrice de l'Office fédéral
de la formation professionnelle et de la technologie. Il est
toutefois atteint par les élèves nés en Suisse et qui y ont fait
toutes leurs classes. On peut donc en déduire qu'il faut faire de
plus grands efforts pour les élèves arrivés en Suisse après leur
naissance, explique-t-elle.

Les milieux concernés sont appelés à se prononcer sur ce rapport
et à faire part de leurs propositions jusqu'au 30 avril. Ce
jour-là, un colloque national réunira les différents acteurs de la
formation. D'ici 2011, des recommandations seront formulées et
intégrées dans les instruments de pilotage de la CDIP et de la
Confédération. Le rapport sur l'éducation en Suisse paraîtra tous
les quatre ans. Le prochain est attendu pour 2014.



ats/os

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Les effets limités de l'alcool et de la cigarette

Le premier rapport sur l'éducation en Suisse ne se contente pas de passer le système scolaire au peigne fin. Il aborde aussi des thèmes de société tels que l'influence de l'alcool et la violence sur les résultats des élèves. Ou les conséquences du surpoids.

Parmi les jeunes, l'alcool reste la substance psycho active la plus fréquemment consommée, indique le rapport. Mais "la fumée et l'alcool n'ont pas obligatoirement des répercussions négatives sur l'école et les résultats scolaires." Tout autre son de cloche sur le cannabis qui "provoque des troubles de l'attention et de la concentration, réduit les facultés motrices et détériore la mémoire à court terme".

Les élèves boivent et fument "significativement moins" que les jeunes en apprentissage, selon le rapport. Mais "il est impossible de déterminer si les écarts s'expliquent par les effets de la sélection". La différence peut s'expliquer par le fait que les apprentis touchent déjà un salaire et peuvent donc s'acheter du tabac et de l'alcool.

Autre paramètre, la violence: celle-ci peut avoir une influence sur les perspectives scolaires, tant de la victime que de l'auteur d'un acte punissable, indique le rapport. Les victimes risquent par exemple de souffrir d'atteintes physiques ou psychiques, qui se traduisent par de la démotivation ou une baisse du rendement scolaire. Quant aux jeunes qui commettent des délits, ils sont en général "moins motivés que les autres". Mais aucune étude n'a prouvé que la délinquance juvénile a une influence directe sur les résultats scolaires.

L'obésité est également un enjeu de société qui peut avoir des conséquences sur la performance à l'école. Si aucune différence n'a été constatée chez les garçons, il semble que le surpoids puisse avoir un effet néfaste sur les résultats scolaires des filles lors des quatre premières années d'école. Selon une étude statistique suisse, 17% des garçons entre 6 et 12 ans et 19% des filles du même âge accusent une surcharge pondérale.

Parmi les adultes, les personnes les mieux formées vivent plus longtemps et sont en meilleure santé. Chez les hommes, l'espérance de vie s'allonge de 16% chez les diplômés d'une haute école. Mais le rapport se garde d'établir un lien clair entre santé et formation. Car une bonne formation est aussi souvent gage d'un meilleur revenu. Et ce dernier augmente l'espérance de vie.

Un manque d'enseignants

S'il n'adresse pas de consignes aux acteurs de la politique et de la formation, le rapport pointe les défis qui les attendent. Parmi ceux-ci, la relève des enseignants.

Chaque année, une haute école pédagogique forme environ 3,5% des effectifs d'enseignants aux degrés préscolaire et primaire du territoire qu'elle dessert. Pour éviter une pénurie, il en faudrait le double.

Dans ce premier panorama, des lacunes subsistent. Les prochaines éditions viendront les combler, assure Ursula Renold. Stefan Wolter pointe du doigt un manque de données statistiques, par exemple pour la formation professionnelle supérieure, mais aussi d'études scientifiques.

Son équipe s'est aussi heurtée à l'absence de plans comptables harmonisés, empêchant de comparer les données financières entre cantons.