La Suisse importera davantage d'énergie cet hiver que les années passées. Mais c'est aussi une question de recherche de profit qui explique ce mouvement.
Si la sécheresse n'a pour l'instant que peu d'incidence sur les
réserves d'eau potable, elle pose toutefois problème pour
l'approvisionnement en énergie hydraulique.
Ainsi, les centrales sur le Rhin et l'Aar ne fournissent que la
moitié de leur production habituelle en hiver, selon l'Association
suisse pour l'aménagement des eaux. Selon celle-ci, la Suisse devra
davantage importer d'énergie cet hiver.
D'autant plus que les lacs de barrage n'ont pas non plus leur
volume habituel.
Niveau bas, prix élevés
Les lacs de barrage suisses sont à sec. Leur taux de remplissage
n'atteint que 50,2%. C'est peu, mais très rentable: le prix du
courant produit par les centrales hydro-électriques pour couvrir
les pics de consommation est au plus haut.
Les barrages contiennent encore moins d'eau qu'à fin 2004,
lorsqu'ils n'étaient remplis qu'à 67,2% de leurs capacités. En
octobre 2003, année marquée par la canicule, ils étaient pleins à
83%.
Le taux de remplissage est généralement bas en hiver, car durant
cette saison les précipitations se font sous forme de neige et les
réserves d'eau sont utilisées pour répondre aux besoins
supplémentaires en électricité. Mais cette année, la situation est
différente puisque les niveaux étaient déjà bas l'automne
dernier.
La panne de la centrale nucléaire de Leibstadt (Argovie) survenue
entre avril et septembre 2005 explique en partie ce manque d'eau.
Les barrages ont en effet dû remplacer la centrale, qui produit à
elle seule en moyenne 17 % de l'électricité suisse.
Question de profit
La libéralisation partielle du marché de l'électricité joue
aussi un rôle dans l'affaire. En effet, les centrales
hydro-électriques suisses peuvent vendre à la bourse de
l'électricité de manière très avantageuse leur courant au point de
crête, c'est-à-dire lorsque la demande est la plus forte comme en
soirée. Au contraire des centrales nucléaires, elles peuvent en
effet produire de l'électricité à la demande.
Le manque d'eau ne devrait guère toucher ce marché, a indiqué
Walter Hauenstein, directeur de l'Association suisse pour
l'aménagement des eaux. L'exportation du courant au point de crête
rapportant plus, on importera simplement du courant meilleur marché
pour l'approvisionnement de base en Suisse.
Les centrales situées au pied des barrages arrêtent leurs turbines
lorsque les prix sont bas afin de préserver de l'eau et elles les
remettent en marche pour les pics de consommation qui se conjuguent
avec des prix beaucoup plus élevés.
Selon Walter Hauenstein, les entreprises électriques pourraient
davantage souffrir des faibles débits dans les rivières que du
manque d'eau dans les barrages. Il serait en effet possible que les
centrales thermiques doivent stopper leur production par manque
d'eau de refroidissement.
Une situation qui va perdurer
Giovanni Jochum, membre de la direction de Rätia Energie et
responsable pour celle-ci du marché électrique, confirme cette
tendance d'importer à bas prix du courant pour l'approvisionnement
de base et d'exporter à des prix élevés de l'électricité pour les
pointes de consommation.
Les lacs de barrage sont désormais aussi utilisés en été pour ce
type de production beaucoup plus rentable, alors que par le passé,
ils ne servaient qu'à produire du courant de base au cours de
l'hiver. Une situation qui va perdurer, selon Giovanni
Jochum.
swissinfo et les agences
Les Suisses goumands
La consommation en électricité en Suisse a augmenté au cours de la dernière année hydrologique de 2,1% par rapport à la précédente, atteignant ainsi un nouveau record. 7,3% du courant a été importé, soit 4500 millions de kilowattheures.
Une année auparavant, seuls 28 millions de kilowattheures avaient été importés.
La Suisse est l'une des plus grosses consommatrices en électricité d'Europe. En 2003, chaque ménage a utilisé 5220 kilowattheures, contre une moyenne européenne de 4040.
Les lacs aussi
- La pénurie d'eau ne concerne pas que les lacs de barrage helvétiques. Ainsi, le Lac Majeur, comme le Lac de Constance, approchent-ils de leurs niveaux historiques le plus bas.
- Mais seules quelques communes connaissent une vraie pénurie d'eau, surtout celles qui tirent leur eau uniquement de sources et dont le système d'approvisionnement n'est pas relié en réseau.
- C'est le cas dans la région du Toggenburg (Saint Gall), ainsi que dans les cantons de Berne, du Jura et de Neuchâtel, dans la vallée de La Brévine en particulier.