Conseiller national démocrate-chrétien depuis 1983, Jean-Philippe Maitre souffrait d'une tumeur au cerveau et avait dû quitter la chambre du peuple au 1er mars 2005.
M. Maitre avait été contraint par le mal qui le rongeait à
abandonner son mandat au Conseil national en février 2005. Il avait
prononcé un discours d'adieu émouvant devant le parlement fédéral,
alors qu'il était affaibli par les traitements médicaux qu'il
devait suivre, et que son visage portait les marques de la
maladie.
Aile libérale
M. Maitre a été un précoce de la politique. Avocat de formation,
appartenant à l'aile plutôt libérale du PDC, il a été élu au Grand
Conseil genevois à 24 ans. Il a ensuite gravi les échelons quatre à
quatre pour finalement se hisser à l'exécutif cantonal alors qu'il
n'était âgé que de 36 ans.
Magistrat chargé de l'économie, M. Maitre a été un ardent
défenseur de l'aéroport de Cointrin. En 1996, il a démissionné avec
fracas du conseil d'administration de Swissair lorsque la compagnie
a abandonné ses vols long-courrier au départ de Genève. Il a aussi
été l'artisan de la promotion économique genevoise.
Sur deux fronts
M. Maitre a aussi effectué une brillante carrière politique au
niveau national. Encore député au Grand Conseil, il a suivi les
traces de son père Yves en étant élu en 1983 au Conseil national.
Quatre ans durant, de 1998 à 2002, il a présidé le groupe PDC aux
Chambres fédérales.
Son titre de «premier citoyen du pays» en tant que président de la
Chambre du peuple a été le couronnement de sa carrière. Ses ennuis
de santé ne lui ont cependant pas permis de mener à terme son
mandat à la tête du Conseil national. La maladie l'a rattrapé la
veille de Noël 2004.
Tumeur au cerveau
Le conseiller national avait subitement perdu connaissance alors
qu'il était au téléphone. Il avait immédiatement été conduit à
l'hôpital où une tumeur au cerveau avait été découverte. Ce
diagnostic avait conduit le démocrate-chrétien à dire au revoir à
la politique, après mûres réflexions.
Jean-Philippe Maitre était un grand amateur de tennis. Le juriste
connaissait également parfaitement les rouages de la politique
fédérale pour l'avoir si longtemps fréquentée. Ses proches le
décrivaient comme un homme de négociation, un adepte des solutions
réfléchies, l'opposé d'un impulsif.
Seul le Conseil fédéral ne s'est pas ouvert à Jean-Philippe
Maitre. Son nom avait pourtant circulé lors de la double démission,
en 1999, de Falvio Cotti et Arnold Koller. Jean-Philippe Maitre, né
le 18 juin 1949 à Genève, était également originaire d'Epauvillers
(JU).
Agences/nw/st
Les réactions
Un homme respecté, d'une grande élégance et doté d'un formidable esprit de synthèse: ceux qui l'ont connu ne tarissent pas d'éloges sur Jean-Philippe Maitre.
«Nous perdons un politicien qui était une idole pour le PDC et pour moi», a témoigné la présidente du PDC Doris Leuthard dans l'émission «Forums» de la Radio suisse romande. Jean-Philippe Maitre recherchait l'équilibre entre la droite et la gauche et était respecté de tous. Et il était prêt à sortir de son chemin pour trouver une solution, a souligné Mme Leuthard.
Sur les mêmes ondes, le conseiller fédéral PDC Joseph Deiss a relevé que la Suisse perd un de ses acteurs politiques les plus écoutés. Thérèse Meyer (PDC/FR), qui a remplacé le Genevois à la présidence du Conseil national, a relevé ses qualités humaines d'abord, techniques et politiques ensuite, dont un formidable esprit de synthèse. «Il a souvent gagné mais est resté modeste.»
Ses adversaires politiques reconnaissent sa stature. Christian Grobet (Indépendants), ancien président du Conseil d'Etat genevois, a évoqué à «Forums» un «homme extrêmement respectueux de ses collègues» qui avait encore de belles années devant lui sur le plan fédéral. «Ce n'est pas étonnant qu'il ait été élu à la présidence du Conseil national.»
Pour sa part, le conseiller national Jacques-Simon Eggly (PLS/GE) a évoqué l'influence de M. Maitre, notamment dans les coulisses et auprès du Conseil fédéral. Il avait d'ailleurs les qualités pour devenir conseiller fédéral, mais le Genevois était là au mauvais moment après le départ de Ruth Dreifuss.
Pour le PDC genevois aussi, M. Maitre aura été «un véritable guide de l'action politique du parti» pendant plus de 20 ans. «Le PDC est aujourd'hui orphelin mais au-delà de sa formation politique, c'est tout un canton qui pleure la disparition d'une figure marquante et emblématique de la vie politique cantonale et nationale».